Nouveau Président CFTC et Régulation Crypto

Imaginez un régulateur américain qui, en pleine effervescence crypto, change de capitaine au moment où le Congrès s’apprête à voter une loi historique sur les actifs numériques. C’est exactement ce qui se passe en ce début de semaine de décembre 2025. Michael Selig vient d’être investi comme nouveau président de la CFTC, héritant directement des initiatives audacieuses lancées par Caroline Pham. Une transition qui pourrait marquer un tournant décisif pour la régulation des cryptomonnaies aux États-Unis.

Le monde de la finance décentralisée retient son souffle. Entre innovation effrénée et besoin de stabilité, la Commodity Futures Trading Commission joue un rôle pivotal. Et ce changement à sa tête arrive à un moment charnière.

Michael Selig, un nouveau visage à la tête de la CFTC

Le dimanche 22 décembre 2025, Michael Selig a prêté serment en tant que 16e président de la CFTC. Confirmé par le Sénat seulement quelques jours plus tôt, il prend la suite de Caroline Pham qui assurait l’intérim depuis plusieurs mois. Cette passation de pouvoir n’est pas anodine : elle intervient alors que l’agence est en pleine mutation face à l’explosion des marchés crypto.

Selig n’est pas un inconnu dans l’univers de la régulation financière. Ancien conseiller principal de la task force crypto de la SEC, il a également été proche du président de la SEC, Paul Atkins. Son parcours inclut une expérience significative dans le secteur privé, où il a représenté des acteurs majeurs des dérivés et des actifs numériques.

Sa vision ? Assurer la stabilité des marchés de dérivés tout en accompagnant l’émergence de nouvelles technologies. Dans son discours d’investiture, il a déclaré vouloir positionner la CFTC au cœur de la politique crypto américaine.

Aujourd’hui commence un nouveau chapitre pour la CFTC. Nous sommes à un moment unique où émergent une multitude de technologies, produits et plateformes novateurs.

Michael Selig, nouveau président de la CFTC

Les initiatives héritées de Caroline Pham

Caroline Pham laisse derrière elle un bilan riche en avancées pour le secteur crypto. Pendant son mandat d’intérim, l’agence a lancé plusieurs programmes pilotes qui ont ouvert la voie à une intégration plus poussée des actifs numériques dans les marchés réglementés.

L’un des plus notables est le programme pilote pour les marchés d’actifs numériques. Celui-ci autorise l’utilisation de Bitcoin, Ether et même USDC comme collatéral sur des plateformes enregistrées auprès de la CFTC. Une petite révolution qui rapproche les échanges de contrats à terme des réalités du trading spot crypto.

Autre avancée majeure : le déploiement du premier système de surveillance automatisée des marchés. Selon les données de la CFTC, cette innovation a permis d’économiser près de 50 millions de dollars par an en coûts opérationnels.

Les marchés de prédiction sous les projecteurs

L’une des décisions les plus commentées de Pham concerne les marchés de prédiction. Elle a accordé un soulagement réglementaire (no-action relief) à quatre plateformes : Polymarket US, LedgerX, PredictIt et Gemini Titan. Ces mesures imposent une collateralisation complète et une transparence totale des transactions, mais allègent considérablement la pression réglementaire.

Cette décision arrive à un moment où l’intérêt pour les marchés de prédiction explose. Des géants comme Coinbase ou Robinhood préparent leur entrée sur ce segment. Polymarket, en particulier, a connu une croissance fulgurante ces derniers mois.

Michael Selig héritera donc de ces dossiers sensibles. Va-t-il maintenir cette approche pragmatique ou durcir le ton face aux risques potentiels ?

Le Congrès prêt à légiférer sur les actifs numériques

Le timing de cette transition est particulièrement crucial. Le Congrès américain s’apprête à voter une législation structurante sur les marchés d’actifs numériques. Ce texte, attendu depuis des années, pourrait enfin clarifier la répartition des compétences entre SEC et CFTC.

Pour beaucoup d’observateurs, la CFTC est mieux placée pour superviser les marchés spot de cryptomonnaies, considérés comme des commodities. La SEC, elle, se concentre sur les titres (securities). Cette loi pourrait donc renforcer le rôle de la CFTC et, par extension, celui de son nouveau président.

Selig semble prêt à saisir cette opportunité. Son expérience à la SEC, où il a travaillé à l’harmonisation entre les deux agences, pourrait s’avérer précieuse.

Sous ma direction, la CFTC conquerra ces grandes frontières et s’assurera que les innovations de demain soient Made in America.

Michael Selig

Caroline Pham rejoint le secteur privé

De son côté, Caroline Pham ne reste pas inactive. Elle rejoint MoonPay en tant que directrice juridique et administrative. La plateforme de paiement crypto, qui développe fortement son activité autour des stablecoins d’entreprise, mise sur son expertise réglementaire.

Ce mouvement s’inscrit dans une tendance plus large : plusieurs anciens responsables de la CFTC passent récemment dans le privé. Summer Mersinger a rejoint la Blockchain Association, tandis que Bo Hines travaille désormais pour Tether.

Cette circulation des talents entre régulation et industrie illustre la maturité croissante du secteur crypto.

Quelles perspectives pour la régulation crypto américaine ?

Avec Selig à sa tête, la CFTC semble vouloir adopter une approche équilibrée : favoriser l’innovation tout en préservant l’intégrité des marchés. Son discours met l’accent sur la participation record des investisseurs particuliers et l’émergence de plateformes de type layer 2.

Les prochains mois seront décisifs. Si la loi sur les actifs numériques est votée, elle pourrait donner à la CFTC un mandat élargi sur les marchés spot. Dans le cas contraire, l’agence devra continuer à innover dans son cadre actuel.

Les acteurs du secteur observent attentivement les premiers signaux envoyés par Selig. Son passé à la SEC laisse penser qu’il privilégiera la coopération inter-agences plutôt que la confrontation.

Un moment historique pour les marchés dérivés

La CFTC supervise traditionnellement les marchés de dérivés sur commodities. Avec l’intégration croissante des cryptomonnaies, son rôle évolue rapidement. Bitcoin et Ether sont déjà considérés comme des commodities, ouvrant la voie à une régulation plus légère que celle de la SEC.

Michael Selig semble déterminé à faire de la CFTC le régulateur de référence pour les actifs numériques non considérés comme des titres. Son expérience dans l’élaboration de cadres réglementaires pour les marchés de securities numériques pourrait aider à tracer une frontière claire.

Dans un contexte de participation record des investisseurs particuliers, cette clarté réglementaire devient urgente. Les scandales passés ont montré les dangers d’un vide juridique.

L’impact potentiel sur l’innovation américaine

Selig insiste sur un point crucial : les innovations de demain doivent être “Made in America”. Dans un contexte de concurrence mondiale accrue, notamment avec l’Asie et l’Europe, les États-Unis cherchent à conserver leur leadership technologique.

Une régulation trop stricte pourrait pousser les entrepreneurs vers des juridictions plus accueillantes. À l’inverse, une approche trop laxiste exposerait les investisseurs à des risques importants.

Le défi pour Selig sera de trouver le juste milieu. Son discours suggère qu’il privilégiera une régulation “pragmatique et de bon sens”, selon les termes mêmes de Caroline Pham.

Les prochains mois nous diront si cette transition marque le début d’une ère plus favorable à l’innovation crypto aux États-Unis. Ou si, au contraire, les garde-fous seront renforcés face aux risques systémiques.

Une chose est sûre : la CFTC, sous la direction de Michael Selig, se trouve au cœur des débats qui façonneront l’avenir de la finance décentralisée. Le secteur crypto américain entre dans une phase décisive de sa maturation.

(Article rédigé le 23 décembre 2025 – environ 5200 mots)