Imaginez : vous vous réveillez un matin et découvrez que le pays qui mine encore 14 % du Bitcoin mondial vient, une nouvelle fois, de déclarer la guerre totale aux cryptomonnaies. C’est exactement ce qui s’est passé le 25 novembre 2025.
La Banque populaire de Chine (PBoC) a publié un communiqué d’une rare fermeté, rappelant que toute activité liée aux « monnaies virtuelles » reste strictement illégale. Et cette fois, elle promet de passer à la vitesse supérieure. Mais alors, pourquoi la Chine s’acharne-t-elle autant, quatre ans après la grande interdiction de 2021 ?
La Chine dit non, encore plus fort aux cryptomonnaies
Le message est limpide et sans appel. Les cryptomonnaies n’ont aucun statut juridique en Chine, elles n’ont pas cours légal et toute activité commerciale qui y est liée est qualifiée d’« activité financière illégale ».
« Les monnaies virtuelles n’ont pas le même statut juridique que les monnaies fiduciaires, elles ne doivent pas et ne peuvent pas être utilisées comme monnaie sur le marché. »
Banque populaire de Chine – Communiqué officiel du 25 novembre 2025
Ce ton martial n’est pas nouveau, mais il intervient dans un contexte particulier : la PBoC constate une recrudescence de la spéculation malgré les interdictions successives. Trading OTC, plateformes offshore, applications déguisées… les Chinois continuent d’utiliser massivement les cryptos.
Les stablecoins, nouvelle cible prioritaire
Parmi toutes les cryptomonnaies, ce sont les stablecoins qui cristallisent aujourd’hui la colère de Pékin. La banque centrale les accuse de ne pas respecter les règles KYC/AML et d’être des vecteurs privilégiés pour :
- Le blanchiment d’argent
- Les fraudes à l’investissement
- Les transferts transfrontaliers illégaux
- Les arnaques de type « pig butchering » (romance scams)
En clair, pour la Chine, USDT, USDC et consorts sont devenus les nouveaux canaux préférés des capitaux qui fuient le contrôle strict des changes.
Une répression à 13 têtes
Pour traquer les contrevenants, la PBoC ne sera pas seule. Elle annonce une coopération renforcée avec 12 autres ministères et agences : police, justice, douanes, administration fiscale, autorités de régulation bancaire et boursière, etc.
Les nouvelles armes de la répression :
- Partage en temps réel des données entre agences
- Surveillance accrue des flux offshore
- Blocage systématique des sites et applications crypto
- Poursuites pénales renforcées contre les organisateurs
- Gel des avoirs bancaires liés
Le paradoxe du minage toujours vivace
Et pourtant… Selon les derniers chiffres du Cambridge Centre for Alternative Finance (octobre 2025), la Chine représente encore 14 % du hashrate mondial du Bitcoin. Elle arrive juste derrière les États-Unis et le Kazakhstan.
Comment est-ce possible ? Simple : après l’exode massif des mineurs en 2021, beaucoup sont revenus discrètement. Ils opèrent désormais dans le gris :
- Mines clandestines dans des zones industrielles reculées
- Utilisation de VPN et de serveurs étrangers
- Partenariats opaques avec des centrales électriques locales
- Facturation déguisée en « calcul haute performance »
Ce minage fantôme est d’autant plus rentable que l’électricité reste très bon marché dans certaines provinces et que le cours du Bitcoin flirte avec des sommets historiques.
Yuan numérique : la seule crypto autorisée
Il y a une cryptomonnaie que la Chine adore : le e-CNY, son yuan numérique. Lancé en 2020, le projet de monnaie numérique de banque centrale est aujourd’hui utilisé par plus de 300 millions de Chinois.
Pour Pékin, la conclusion est simple : pourquoi laisser les citoyens utiliser des monnaies décentralisées et incontrôlables alors qu’une alternative 100 % étatique, traçable et programmable existe déjà ?
« Le yuan numérique permet de réaliser tous les avantages des cryptomonnaies… sans leurs inconvénients. »
Analyste de la PBoC, 2024
Conséquences pour le marché mondial
À court terme, cette annonce n’a provoqué aucune panique notable. Le Bitcoin a même gagné 2 % dans les 24 heures suivant le communiqué. Les marchés semblent considérer que :
- L’interdiction était déjà connue et intégrée
- La répression réelle reste difficile à appliquer à 100 %
- Les flux chinois passent majoritairement par Hong Kong ou Singapour
Cependant, à moyen terme, une traque efficace des stablecoins pourrait compliquer la vie des traders chinois et indirectement peser sur la liquidité mondiale de l’USDT, qui reste le roi des échanges en Asie.
Et maintenant ?
La Chine ne changera probablement pas de position tant que le Parti communiste sera au pouvoir. Le contrôle absolu des flux financiers reste une priorité stratégique, surtout dans un contexte de ralentissement économique et de fuite des capitaux.
Pour les investisseurs, le message est clair : la Chine reste un géant aux pieds d’argile dans le monde crypto. Elle mine, elle trade en cachette, elle innove avec son yuan numérique… mais elle refuse officiellement le principe même de décentralisation.
Une chose est sûre : tant que le Bitcoin existera, des Chinois trouveront le moyen de l’utiliser. L’histoire nous l’a déjà prouvé à plusieurs reprises.
Et vous, pensez-vous que cette nouvelle vague de répression sera plus efficace que les précédentes ? Ou assisterons-nous, une fois encore, à un simple jeu du chat et de la souris à l’échelle d’un milliard quatre cents millions d’habitants ?
