Imaginez un instant : un régulateur américain historiquement prudent face aux innovations financières accueille à sa tête un homme connu pour ses positions favorables aux cryptomonnaies. Cette scène n’est plus une hypothèse, elle est devenue réalité le 18 décembre 2025. Le Sénat des États-Unis vient de confirmer Michael Selig comme nouveau président de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC). Une nomination qui fait déjà vibrer l’ensemble de l’écosystème crypto.
Dans un contexte où la régulation des actifs numériques reste un sujet brûlant, ce choix pourrait marquer un tournant décisif. Moins de formalisme tatillon, plus d’attrait pour l’innovation onshore : voilà ce que beaucoup espèrent. Mais qui est vraiment Michael Selig ? Et surtout, quelles conséquences concrètes pour le marché des cryptomonnaies ?
Michael Selig à la tête de la CFTC : un vent nouveau sur la régulation crypto
La confirmation de Michael Selig met fin à une période d’intérim longue de près d’un an à la CFTC. Caroline Pham, qui assurait la présidence par intérim, a tenu les rênes avec fermeté, mais l’agence fonctionnait avec des moyens limités en termes de leadership confirmé. Désormais, Selig arrive avec un bagage solide et une vision claire.
Ce n’est pas un inconnu pour l’institution. Il a débuté sa carrière en 2014 comme clerc juridique auprès de Christopher Giancarlo, alors commissaire et futur président de la CFTC. Une époque où l’agence commençait à s’intéresser sérieusement au Bitcoin et aux dérivés crypto. Après un passage dans le secteur privé où il conseillait exchanges et sociétés d’actifs numériques, Selig a rejoint cette année la Crypto Task Force de la Securities and Exchange Commission (SEC) en tant que chief counsel.
Son parcours le place au cœur des débats inter-agences sur la supervision des marchés numériques. Il connaît les rouages des deux grands régulateurs américains : la CFTC pour les commodities et la SEC pour les securities. Cette double expertise est précieuse alors que la frontière entre les deux reste floue pour de nombreux tokens.
Un profil résolument pro-innovation
Lors de son audition au Sénat, Michael Selig n’a pas mâché ses mots. Il a plaidé pour une approche réglementaire plus mesurée, évitant les poursuites pour des violations techniques mineures qui, selon lui, consomment des ressources sans améliorer la protection des investisseurs.
Les actions en justice pour des problèmes techniques mineurs peuvent drainer les ressources et pousser les entreprises légitimes à l’offshore, sans pour autant renforcer l’intégrité des marchés.
Michael Selig, lors de son audition
Cette position résonne avec celle adoptée sous la direction intérimaire de Caroline Pham. Au cours de l’année 2025, la CFTC a recentré ses efforts sur les fraudes graves et les manipulations touchant directement les particuliers. Les violations administratives purement formelles ont été reléguées au second plan.
Selig insiste toutefois sur la nécessité de maintenir une présence forte contre les abus réels. L’agence doit rester “un policier sur la route”, mais cibler les comportements qui causent un préjudice concret. Cette nuance est cruciale : elle distingue une régulation hostile d’une régulation intelligente.
Les priorités attendues sous sa présidence
Plusieurs dossiers chauds attendent le nouveau président. Tout d’abord, le développement des programmes pilotes déjà lancés par la CFTC. L’agence a ouvert la voie à l’utilisation de collatéral tokenisé dans les dérivés et à la cotation de produits spot crypto sur des plateformes régulées.
Ces initiatives visent à ramener l’activité crypto sur le sol américain. Trop d’innovations se développent aujourd’hui à l’étranger en raison d’un cadre perçu comme hostile. Selig devrait accélérer ces efforts et pousser pour des règles de structure de marché plus claires.
Les grands chantiers à venir pour Michael Selig :
- Poursuivre et élargir les programmes pilotes sur la tokenisation et les produits spot.
- Renforcer la coordination avec la SEC, le Trésor et les régulateurs bancaires.
- Maintenir une politique d’enforcement ciblée sur la fraude et la manipulation.
- Préparer l’agence à une éventuelle extension de son mandat sur les marchés spot de commodities numériques.
- Promouvoir des règles claires pour favoriser l’innovation onshore.
La coordination inter-agences sera déterminante. Selig a déjà participé aux discussions entre CFTC et SEC. Son expérience récente à la Crypto Task Force de la SEC lui donne une légitimité unique pour faire avancer les dossiers communs.
Le contexte législatif : une expansion possible du rôle de la CFTC
Le timing de cette nomination n’est pas anodin. Le Congrès examine actuellement plusieurs projets de loi visant à clarifier la régulation des cryptomonnaies. L’un des points centraux : attribuer à la CFTC la supervision principale des marchés spot de crypto-commodities (comme le Bitcoin ou l’Ethereum, considérés comme commodities et non securities).
Si ces textes sont adoptés, le périmètre de la CFTC s’élargirait considérablement. L’agence passerait d’un rôle centré sur les dérivés à une supervision directe des marchés au comptant pour certains actifs. Michael Selig arriverait donc au moment où l’institution pourrait connaître sa plus grande transformation depuis des décennies.
Cette perspective enthousiasme de nombreux acteurs du secteur. La CFTC est généralement perçue comme plus pragmatique et moins idéologique que la SEC sur les questions crypto. Une extension de son mandat pourrait créer un environnement plus favorable à l’innovation tout en maintenant des garde-fous contre les abus.
Les réactions du secteur crypto
La nouvelle a été accueillie avec enthousiasme par une grande partie de la communauté crypto. Nombreux sont ceux qui y voient le signe d’un changement de paradigme à Washington. Après des années de régulation par l’enforcement sous la précédente administration, l’arrivée d’un président pro-innovation est perçue comme un signal positif.
Les exchanges américains, les protocoles DeFi et les émetteurs de tokens attendent des guidelines plus précises. Ils espèrent pouvoir développer leurs activités sans craindre des actions surprises pour des interprétations floues de la loi. La position de Selig sur les violations techniques mineures répond directement à cette préoccupation.
Cependant, certains observateurs appellent à la prudence. Une régulation trop légère pourrait ouvrir la porte à de nouveaux scandales. Le souvenir de FTX et d’autres affaires reste vif. L’équilibre entre innovation et protection des investisseurs sera le défi majeur du nouveau président.
Comparaison avec les prédécesseurs
Pour mieux comprendre l’impact potentiel, un retour sur les précédents présidents s’impose. Christopher Giancarlo, surnommé “Crypto Dad”, avait déjà posé les bases d’une approche constructive en classant le Bitcoin comme commodity et en autorisant les premiers futurs Bitcoin.
Caroline Pham, durant son intérim, a poursuivi dans cette voie en recentrant l’enforcement et en lançant les programmes pilotes. Michael Selig s’inscrit dans cette continuité tout en apportant sa touche personnelle forgée par son passage récent à la SEC.
Contrairement à certains présidents plus traditionnels, Selig combine une connaissance profonde des marchés dérivés classiques et une compréhension fine des spécificités des actifs numériques. Cette double casquette pourrait lui permettre de parler le même langage que les acteurs traditionnels tout en défendant les intérêts de l’innovation crypto.
Les défis à court terme
Malgré l’enthousiasme, le chemin reste semé d’embûches. Le budget de la CFTC reste limité face à l’ampleur des marchés qu’elle supervise. Les équipes doivent gérer à la fois les dérivés traditionnels (agricoles, énergie, métaux) et l’émergence rapide des produits crypto.
La coordination avec la SEC reste parfois laborieuse. Les deux agences ont des cultures différentes et des interprétations divergentes sur la nature de nombreux tokens. Selig devra jouer un rôle de pont pour éviter les chevauchements ou les zones grises préjudiciables aux acteurs du marché.
Enfin, le calendrier législatif est incertain. Même si les projets de loi avancent, leur adoption définitive pourrait prendre des mois, voire être reportée à la prochaine session. Entre-temps, Selig devra gérer l’existant avec pragmatisme.
Perspectives à moyen et long terme
À plus long terme, la présidence de Michael Selig pourrait marquer l’histoire de la régulation crypto américaine. Si les réformes législatives aboutissent, la CFTC deviendra le régulateur principal pour une large partie du marché spot. Cela placerait les États-Unis en position de concurrencer des juridictions plus accueillantes comme Dubaï, Singapour ou certaines nations européennes.
L’attractivité du marché américain pour les talents et les capitaux en dépend. Aujourd’hui, beaucoup de projets préfèrent s’établir à l’étranger par peur d’une régulation imprévisible. Une CFTC dirigée par Selig pourrait inverser cette tendance.
Plus globalement, cette nomination s’inscrit dans un mouvement plus large de maturation du secteur. Les cryptomonnaies ne sont plus une curiosité marginale. Elles représentent des milliers de milliards de capitalisation et touchent des millions d’investisseurs particuliers. Une régulation adaptée est devenue inévitable.
Une régulation claire et proportionnée est le meilleur moyen de protéger les investisseurs tout en favorisant l’innovation américaine.
Vision partagée par de nombreux acteurs du secteur
La route est encore longue, mais la confirmation de Michael Selig constitue une étape importante. Elle montre que Washington commence à écouter les arguments en faveur d’une approche équilibrée. Reste à transformer ces intentions en actions concrètes.
Le secteur crypto retiendra son souffle dans les prochains mois. Les premières décisions de Selig, les avancées législatives et la dynamique inter-agences donneront le ton. Une chose est sûre : 2026 s’annonce comme une année charnière pour la régulation des actifs numériques aux États-Unis.
Et vous, que pensez-vous de cette nomination ? Va-t-elle enfin permettre aux États-Unis de redevenir un leader mondial de l’innovation blockchain ? L’avenir nous le dira, mais les signaux sont encourageants.
