Le projet révolutionnaire de preuve d’identité numérique Worldcoin, piloté par Sam Altman, suscite autant de curiosité que d’inquiétudes depuis son lancement. En Espagne, le scandale n’a pas tardé : en mars dernier, l’Agence Espagnole de Protection des Données (AEPD) a suspendu toutes les activités de la startup suite à des préoccupations concernant la collecte et l’utilisation des données biométriques des utilisateurs, notamment les mineurs.

Trois mois plus tard, alors que Worldcoin attend fébrilement une décision de l’Office d’État bavarois pour la protection des données, la suspension est toujours maintenue. Les autorités espagnoles l’ont confirmé récemment :

L’entreprise s’est engagée de manière juridiquement contraignante à ne pas reprendre son activité en Espagne avant la fin de l’année ou jusqu’à la décision finale de l’autorité bavaroise de protection des données.

Communiqué des autorités espagnoles

Worldcoin dans les limbes du RGPD

Car c’est bien le respect du sacro-saint Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) européen qui est en jeu. L’audit mené par les allemands du BayLDA doit déterminer si le procédé de scan de l’iris utilisé par Worldcoin, via son Orb, est conforme aux règles en vigueur. Une décision est attendue “bientôt” selon le régulateur bavarois.

Du côté de Worldcoin, on assure que la suspension prolongée des activités en Espagne est une initiative volontaire de leur part, le temps de clarifier la situation. La startup ne cache pas sa frustration face à l’attitude de l’AEPD :

Il est regrettable que l’autorité espagnole répande des allégations inexactes et trompeuses sur notre technologie à l’échelle mondiale après que nos efforts pour leur fournir une vision précise de Worldcoin et de World ID soient restés sans réponse pendant des mois.

Tools for Humanity, la société derrière le projet, met en avant les améliorations apportées ces derniers mois concernant le stockage et l’accès aux données, ainsi que la vérification de l’âge des participants. Espérant un feu vert rapide, le porte-parole cite même un sondage interne selon lequel “près de 90% des utilisateurs espagnols soutenaient le retour du projet”.

L’identité numérique du futur ou un mirage orwellien ?

Au-delà des déboires réglementaires, c’est bien la raison d’être de Worldcoin qui interpelle. Ce sésame biométrique, ultra-personnalisé et infalsifiable, a vocation à devenir un standard pour sécuriser et fluidifier nos interactions en ligne. D’aucuns y voient une innovation majeure pour le Web3 et une arme anti-bots.

Mais les craintes d’une dérive à la Big Brother, où nos données les plus intimes seraient entre les mains d’une IA toute puissante, sont légion. Si la technologie semble en avance sur son temps, la société est-elle prête ? Le cadre légal et éthique doit encore être solidifié. En attendant, l’Espagne a choisi la prudence, comme un symbole des défis à venir pour réconcilier innovation et protection de la vie privée à l’ère du numérique.

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