Le monde de la crypto n’en finit plus de trembler face aux piratages à répétition. Dernière victime en date : WazirX, le plus grand exchange indien, qui a subi le 18 juillet dernier le vol de plus de 230 millions de dollars en cryptomonnaies. Un coup dur pour la plateforme, mais aussi et surtout pour ses utilisateurs, à qui WazirX propose maintenant de partager la facture…
WazirX victime d’un piratage massif
C’est un véritable braquage virtuel qui a visé WazirX le 18 juillet. Des pirates ont réussi à s’introduire dans l’un des portefeuilles multisig de l’exchange, dérobant l’équivalent de 230 millions de dollars en cryptomonnaies, dont 15 298 Ethereum (ETH). Via une série d’échanges, les malfaiteurs ont ensuite accumulé un total de 59 097 ETH.
Résultat : 45% des fonds des utilisateurs ont disparu, mettant à mal la capacité de WazirX à assurer la liquidité des actifs restants. La plateforme a dû geler tous les retraits, aussi bien en cryptos qu’en roupies indiennes, tandis que les cours se sont effondrés, bien en-deçà des prix du marché.
Un plan de recouvrement qui passe mal
Pour tenter de redresser la barre, WazirX a dévoilé le 27 juillet un plan de recouvrement très controversé, baptisé “stratégie des pertes socialisées”. L’idée : répartir les pertes sur l’ensemble des utilisateurs afin qu’aucun groupe ne soit lésé de manière disproportionnée.
Concrètement, les clients n’auraient accès immédiatement qu’à 55% de leurs avoirs. Les 45% restants seraient bloqués sur la plateforme sous forme de jetons indexés sur le Tether, un stablecoin. Leur restitution éventuelle dépendrait de la capacité de WazirX à récupérer les fonds volés.
Pour recueillir l’avis des utilisateurs, un sondage a été soumis, offrant le choix entre accéder immédiatement à 55% des fonds sans pouvoir les retirer, ou pouvoir retirer ces 55% mais de façon échelonnée. Un choix cornélien qui a suscité de vives réactions.
Des utilisateurs en colère
Sur les réseaux sociaux, les critiques ont fusé, accusant WazirX de faire porter le chapeau à ses clients. Sumit Gupta, CEO de CoinDCX, estime ainsi que la charge des pertes devrait incomber en premier lieu à WazirX, en puisant dans ses propres réserves.
Kashif Raza, un autre observateur, a quant à lui mis en lumière plusieurs failles dans la solution proposée par WazirX :
- Le calcul des actifs aurait dû se faire sur la base des cours antérieurs au piratage, et non après
- Les 30% de jetons WRX alloués à l’origine à l’équipe et à la fondation devraient servir à indemniser les victimes
- Il est injuste de pénaliser les utilisateurs dont les jetons n’ont pas été dérobés
D’autres s’inquiètent des possibles conséquences fiscales, qui s’ajouteraient aux pertes subies. Certains en appellent même à la justice et à une enquête pour déterminer s’il s’agit bien d’un piratage extérieur ou d’un coup monté en interne.
Le silence assourdissant des autorités
Paradoxalement, alors que l’Inde est devenue un leader mondial de l’adoption des cryptos, le gouvernement et les régulateurs restent étrangement muets sur le sujet. Un contraste saisissant avec la sévérité des règles fiscales mises en place.
Depuis 2022, en Inde :
- Les revenus des transactions en cryptos sont taxés à 30%
- Aucune déduction n’est autorisée, sauf le coût d’acquisition
- Les pertes ne peuvent être compensées avec d’autres revenus ou reportées
L’ironie est frappante : l’État se montre prompt à taxer les gains, mais aux abonnés absents quand les choses tournent mal. Une approche qui crée un environnement précaire pour les investisseurs, pris entre le marteau de la fiscalité et l’enclume de l’insécurité.
Pour l’heure, face au tollé, WazirX tente de calmer le jeu en assurant que son sondage n’est qu’une étape préliminaire et n’engage à rien. L’exchange promet de prendre en compte tous les retours avant d’annoncer de prochaines étapes. Mais la confiance semble d’ores et déjà sérieusement écornée.
WazirX parviendra-t-il à apaiser la colère de ses utilisateurs ? Une colère à la hauteur des espoirs suscités par l’adoption massive des cryptos en Inde. Car plus qu’un simple piratage, c’est bien la réputation de tout un écosystème qui est en jeu. Aux autorités indiennes de sortir de leur réserve pour enfin encadrer et sécuriser cet Eldorado numérique.