Imaginez une entreprise en difficulté qui, du jour au lendemain, annonce qu’elle place des millions dans du Bitcoin. Le cours de son action bondit de 200 %, les analystes applaudissent, les investisseurs affluent. Trois mois plus tard, silence radio : l’action est retombée plus bas qu’avant et personne ne comprend vraiment ce que l’entreprise fabrique avec ses bitcoins. Cette histoire, vous l’avez déjà vue des dizaines de fois depuis 2021.

Ce phénomène a un nom : les trésors d’actifs numériques des entreprises, ou « Digital Asset Treasuries » (DAT). Et la vérité froide, c’est que la grande majorité d’entre elles ressemblent à de très mauvais ETF qui auraient oublié d’être régulés, transparents et liquides.

Pourquoi tant de trésors crypto sont des ETF déguisés (et en pire)

Quand BlackRock ou Fidelity lancent un ETF Bitcoin spot, vous savez exactement ce que vous achetez : du Bitcoin pur, détenu en cold storage par un custodian régulé, avec création/rédemption quotidienne et une transparence totale. Le prix de l’ETF colle presque parfaitement au NAV (valeur nette d’inventaire).

Maintenant regardez la plupart des sociétés cotées qui annoncent « nous mettons 100 millions en Bitcoin ». Que se passe-t-il vraiment ?

  • Le Bitcoin est souvent détenu sur le bilan de l’entreprise, parfois même grevé de dettes.
  • Vous achetez l’action avec une décote ou une prime énorme (et volatile) par rapport au Bitcoin détenu.
  • Vous subissez aussi tout le risque opérationnel de l’entreprise d’origine (qui fabrique encore des serveurs, des logiciels ou… rien du tout).
  • Aucune création/rédemption : vous êtes coincé avec la liquidité de l’action.

Résultat : vous payez cher un produit bien moins bon qu’un vrai ETF. Et pourtant, des centaines de sociétés ont tenté le coup depuis que MicroStrategy a montré la voie en 2020.

« Les meilleurs trésors numériques font quelque chose de difficile » – Matt Hougan, CIO de Bitwise

Le précédent historique qui doit faire peur

En 2017, une société appelée Long Island Iced Tea Corp a changé de nom pour Long Island Blockchain Corp. Résultat ? +300 % en quelques heures. Puis faillite totale. Des dizaines d’entreprises ont suivi le même chemin : Kodak, des brasseurs de bière, des producteurs de films… Toutes ont fini en fumée.

Aujourd’hui c’est la même musique, mais avec du Bitcoin au lieu de « blockchain ». Et le risque est encore plus grand : les montants engagés sont colossaux.

MicroStrategy : l’exception qui confirme la règle

Il y a une raison pour laquelle tout le monde parle encore de MicroStrategy en 2025 : ils ont compris quelque chose que les autres n’ont pas.

Depuis 2020, l’entreprise de Michael Saylor a levé plus de 50 milliards de dollars… presque exclusivement en équity (actions et convertibles). Ils ont transformé la prime énorme que le marché accorde à leur action (parfois +100 % au-dessus du NAV Bitcoin) en machine à acheter encore plus de BTC. C’est un cercle vertueux génial tant que la prime tient.

Le miracle MicroStrategy en chiffres (fin 2025) :

  • Plus de 400 000 BTC en trésorerie
  • Coût moyen d’acquisition inférieur à 40 000 $
  • Plus de 16 % de tout l’equity levé sur les marchés US en 2024 provient… de MicroStrategy
  • Création de produits dérivés (obligations convertibles, preferred shares) pour tous les appétits de risque

Les autres ? La plupart financent leurs achats de Bitcoin par de la dette ou des convertibles à taux élevé. Quand le cours du Bitcoin baisse de 30 %, la valeur de leur collatéral chute, les appels de marge arrivent, et c’est la spirale.

La concurrence des vrais ETF rend la vie impossible

Depuis 2024, nous avons des ETF Bitcoin spot aux États-Unis, puis Ethereum, puis Solana (avec staking inclus pour certains). Ces produits offrent :

  • Une liquidité parfaite
  • Une transparence totale
  • Des frais ridicules (0,20 % par an)
  • Pas de risque de contrepartie corporate

Pourquoi diable acheter l’action d’une société qui détient 80 % de Bitcoin et 20 % de dettes douteuses quand vous pouvez avoir du Bitcoin pur pour moins cher et sans risque ?

Comment survivre quand on n’est pas MicroStrategy

Les trésors numériques qui veulent vivre au-delà de 2026 n’ont plus le choix : ils doivent cesser d’être des ETF moches pour devenir de véritables participants des réseaux qu’ils prétendent aimer.

Voici les pistes concrètes qui séparent déjà les futurs gagnants des futurs cadavres :

  • Devenir validateur à grande échelle – Gagner des commissions en sécurisant les réseaux (Ethereum, Solana, Bitcoin via Babylon ou CoreDAO)
  • Générer du yield actif – Prêter du BTC collatéralisé, fournir de la liquidité sur des protocoles DeFi solides, investir dans des RWA (Real World Assets)
  • Diversifier intelligemment – Sortir du « 95 % Bitcoin, 5 % cash » pour aller chercher des rendements décorrélés
  • Participer à la gouvernance – Utiliser ses centaines de milliers de tokens pour influencer les protocoles et capter de la valeur

Quelques sociétés commencent à comprendre. On voit apparaître des trésors qui deviennent :

  • Top 10 validateurs sur Solana ou Ethereum
  • Fournisseurs de liquidité majeurs sur Aave ou Morpho avec leur BTC comme collatéral
  • Investisseurs dans des protocoles Bitcoin DeFi (Babylon, Stacks, Core, Hemi)

Le vainqueur ne sera pas celui qui a acheté le plus de Bitcoin, mais celui qui sait en faire quelque chose d’utile pour le réseau.

Le risque systémique qu’on refuse de voir

Fin 2025, plus de 200 sociétés cotées détiennent du Bitcoin en trésorerie. Beaucoup sont financées par de la dette. Si le Bitcoin chute de 50 % d’un coup (ce qui est déjà arrivé plusieurs fois), on risque une cascade de liquidations qui ferait très mal aux marchés actions traditionnels.

MicroStrategy survivra probablement (leur structure est incroyablement résiliente). Les autres ? Beaucoup ne passeront pas l’hiver.

Conclusion : la grande séparation approche

Dans les deux prochaines années, nous allons assister à une séparation brutale entre deux catégories :

  • Les touristes du Bitcoin – Ceux qui ont voulu faire un coup boursier rapide. La plupart vont disparaître ou se retrouver avec des actions à 90 % en dessous de leur pic.
  • Les citoyens des réseaux – Ceux qui investissent dans l’infrastructure, génèrent du yield, participent activement. Eux deviendront les nouveaux géants.

Le trésor Bitcoin corporate n’est pas mort. Il est juste en train de muter. Ceux qui refusent de comprendre cela seront balayés. Les autres écriront peut-être l’histoire de la prochaine décennie crypto.

Et vous, dans quel camp pensez-vous que sera votre entreprise préférée qui « fait du Bitcoin » ? Les commentaires sont ouverts.

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Passionné et dévoué, je navigue sans relâche à travers les nouvelles frontières de la blockchain et des cryptomonnaies. Pour explorer les opportunités de partenariat, contactez-nous.

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