L’affaire Binance au Nigéria prend une tournure diplomatique alors que Tigran Gambaryan, responsable conformité de l’exchange, croupit toujours dans une geôle d’Abuja. Malgré plusieurs tentatives infructueuses de la part de ses proches, de sa hiérarchie et même de parlementaires américains pour le faire libérer, l’horizon semble bouché. C’est dans ce contexte que deux députés républicains viennent de déposer une résolution pour demander à l’administration Biden de considérer M. Gambaryan comme un otage des autorités nigérianes.

Une situation ubuesque qui perdure

Rich McCormick, élu de Georgie, et James French Hill, représentant de l’Arkansas, ont soumis le 10 juillet un texte enjoignant le gouvernement nigérian à “libérer immédiatement Tigran Gambaryan“. Ils y détaillent le calvaire vécu par ce dernier, venu s’expliquer de bonne foi devant la justice locale concernant les activités de Binance dans le pays, avant d’être arrêté et incarcéré pour des motifs fallacieux comme le blanchiment d’argent.

Les deux parlementaires insistent sur l’illégalité de la procédure, rappelant au passage le passé irréprochable de cet ancien agent fédéral ayant œuvré avec succès dans de nombreuses enquêtes médiatiques. Ils révèlent aussi les graves ennuis de santé rencontrés par le détenu, sujet à des crises récurrentes de paludisme qui minent son état général dans des conditions de détention déplorables.

Cette situation relève d’une violation manifeste des Droits de l’Homme élémentaires.

Rich McCormick, député

De la pression diplomatique à la prise d’otage

Pour les auteurs de la résolution, il est urgent d’agir face au statu quo imposé par une justice nigériane au fonctionnement opaque et parcellaire. L’été et la trêve judiciaire qui l’accompagne risquent en effet de prolonger indûment la détention arbitraire de M. Gambaryan si rien n’est fait.

Au-delà des protestations d’usage et des appels à une procédure régulière, les élus demandent solennellement à l’exécutif américain de franchir un cap. Ils l’exhortent ainsi à “déclarer officiellement Tigran Gambaryan comme un citoyen américain détenu à tort par un gouvernement étranger” au sens de la loi sur la prise d’otage.

Le texte déposé au Congrès demande notamment :

  • La libération immédiate de Tigran Gambaryan
  • Son accès à des soins appropriés pendant sa détention
  • La garantie d’une procédure régulière conforme au droit et aux droits humains

Tigran Gambaryan, un enjeu géopolitique malgré lui

Indéniablement, le responsable conformité de Binance est en train de se transformer en symbole des frictions entre grandes puissances sur le terrain de la régulation crypto. Son maintien en détention est désormais autant une affaire judiciaire qu’un levier de négociation diplomatique.

Ce nouveau développement devrait logiquement accélérer les tractations en coulisse pour trouver une issue favorable au dossier. Au-delà d’un échange tendu entre chancelleries, l’administration américaine se doit d’apporter une réponse à la hauteur de la situation d’un de ses citoyens pris au piège d’un imbroglio politico-judiciaire dans un pays tiers.

Le Nigéria peut-il continuer de défier les États-Unis en retenant un de leurs ressortissants ?

Derrière le cas personnel de M. Gambaryan se profile l’épineuse question de la coopération judiciaire internationale dans l’écosystème des cryptomonnaies. Les États, prompts à réclamer la collaboration des acteurs privés quand ils en ont besoin, sont bien plus frileux à jouer le jeu de la réciprocité quand leurs propres intérêts sont en cause.

Le bras de fer diplomatique engagé autour de Tigran Gambaryan sera donc scruté avec attention par toute l’industrie. Au-delà d’un fait divers sordide, il est emblématique des enjeux de souveraineté qui se cristallisent autour des crypto-actifs. L’affaire est à suivre de près tant elle pourrait créer un précédent, dans un sens ou dans l’autre.

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