Derrière l’innocente façade du stablecoin Tether se cache une sombre réalité: les cybercriminels utilisent massivement l’USDT pour leurs sombres desseins, à une échelle bien plus importante qu’on ne le pense. Des récents rapports ont mis en lumière l’ampleur du phénomène, pointant du doigt notamment les tristement célèbres arnaques de “pig butchering” et de sextorsion.
Tether, la monnaie stable des escrocs en ligne
Selon la société d’analyse blockchain Elliptic, plus de 11 milliards de dollars en Tether auraient atterri dans les portefeuilles de cybercriminels ces trois dernières années. La plateforme Huione Guarantee semble jouer un rôle central dans ce réseau souterrain, facilitant les transactions entre escrocs et acheteurs de services illicites.
Sur ce véritable “Amazon du crime”, certains marchands proposent ouvertement leurs services de blanchiment d’argent, ciblant en particulier les gains issus des arnaques de “pig butchering”. D’autres se spécialisent dans le recel des profits de la sextorsion. Huione Guarantee permet même d’acquérir clé en main des sites web d’investissements frauduleux et des logiciels d’usurpation d’identité pour piéger les victimes.
L’envers du décor des “pig butchering scams”
Ces arnaques dites de “pig butchering” (“abattage de cochon”) consistent à appâter des individus, souvent en usurpant une identité sur les applis de rencontre, pour les convaincre d’investir leurs économies dans de faux placements crypto. Des milliards de dollars partent ainsi en fumée. Mais les premières victimes sont souvent les “rabatteurs” eux-mêmes, piégés par de fausses promesses d’emploi en Asie du Sud-Est.
Le destin tragique des escrocs malgré eux:
- Attirés au Cambodge ou au Myanmar par des offres d’emploi alléchantes
- Séquestrés et forcés d’arnaquer sous la menace, passeports confisqués
- Torturés avec des matraques ou des menottes électrifiées en cas de refus
- Poussés au suicide ou morts dans des circonstances suspectes
La transparence de la blockchain, arme à double tranchant
Si les transactions en cryptos permettent de suivre les flux d’argent sale, elles sont aussi prisées pour leur caractère pseudonyme. La Chine, où le crypto trading est interdit, concentre une part importante de cette activité. Rien qu’en un an, 17 milliards de dollars en Tether sur la blockchain TRON auraient été liés à des activités criminelles dans le pays selon l’ONU.
Des demandes de rançon en USDT par des kidnappeurs ont aussi été rapportées, comme dans le cas d’un enfant de 3 ans enlevé à Hong Kong en échange de 640 000$ en Tether. Si les exchanges et processeurs de paiement crypto multiplient les efforts, la blockchain TRON reste un havre pour le financement du terrorisme, avec une hausse de 125% des adresses TRON recevant des USDT dans ce cadre.
Face à ces révélations alarmantes, Tether se défend en pointant du doigt une “interprétation erronée des données” et une généralisation abusive. Il n’empêche, l’ampleur de l’utilisation criminelle de l’USDT soulève de sérieuses questions sur les dangers de l’anonymat permis par certaines cryptomonnaies. Un problème épineux auquel régulateurs et acteurs de l’industrie devront s’attaquer de front.