Imaginez : vous vous réveillez, votre café encore fumant, et vous découvrez que les ETF à effet de levier 5x sur Bitcoin ou Nvidia que tout le monde attendait viennent de prendre un énorme stop-loss réglementaire. C’est exactement ce qui s’est passé le 2 décembre 2025.

En l’espace de quelques heures, la Securities and Exchange Commission américaine a littéralement coupé l’herbe sous le pied des émetteurs les plus audacieux. Neuf lettres d’avertissement, des retraits massifs de dossiers, et une règle oubliée de 2020 qui resurgit comme un fantôme : la Rule 18f-4. Retour sur un séisme qui va redessiner le paysage des produits crypto pour les investisseurs retail.

La SEC dit stop aux ETF « turbo » : ce qui vient de se passer

Personne ne s’y attendait vraiment. Depuis l’approbation des ETF spot Bitcoin et Ethereum en 2024, le régulateur semblait avoir changé de braquet. Les produits structurés pleuvaient : ETF à rendement couvert, options income, micro-stratégies… Tout laissait penser que la porte était grande ouverte.

Et puis, patatras.

Le 2 décembre, la SEC publie neuf lettres adressées aux poids lourds du secteur : Direxion, ProShares, Tidal Financial Group, Volatility Shares, 21Shares… Le message est limpide : vos projets d’ETF 3x, 4x ou 5x (qu’ils soient sur actions ou cryptos) dépassent la limite légale de value-at-risk autorisée par la Rule 18f-4. Soit vous modifiez, soit vous retirez. Point final.

Moins de 24 heures plus tard, ProShares jette l’éponge sur plusieurs dossiers très médiatisés. D’autres émetteurs suivront probablement dans les jours qui viennent.

La Rule 18f-4, cette règle que tout le monde avait oubliée

Adoptée en 2020 sous l’ère Trump, la Rule 18f-4 fixe un cadre strict à l’utilisation des dérivés par les fonds d’investissement. Son principe phare ? Un fonds ne peut pas exposer ses investisseurs à un value-at-risk supérieur à 200 % de l’indice de référence (ou 20 % de la valeur du fonds en VaR absolue).

Traduction concrète : un ETF 2x qui suit le Bitcoin passe tout juste sous la barre les bons jours. Un 3x commence à flirter dangereusement. Un 5x ? C’est game over, même par temps calme.

« La règle n’a pas changé depuis 2020, mais son application stricte aux nouveaux produits leveraged est une surprise pour beaucoup d’acteurs. »

Un avocat spécialisé en ETF à Washington, sous couvert d’anonymat

Qui sont les grands perdants de ce coup de frein ?

Les produits qui viennent de prendre la porte :

  • Volatility Shares 5x Bitcoin et 5x Ethereum
  • Direxion Daily Crypto 3x et 4x
  • ProShares UltraPro Bitcoin (3x) et plusieurs single-stock 3x (Nvidia, Tesla, MicroStrategy)
  • 21Shares Hyperliquid Leveraged Token ETF
  • Tidal et REX Shares sur des stratégies similaires

Certains dossiers étaient déjà très avancés. Volatility Shares avait même annoncé être le « premier » à proposer du 5x aux États-Unis. Raté.

Pourquoi maintenant ? Les vraies raisons derrière le timing

Plusieurs facteurs se cumulent.

D’abord, l’explosion de la popularité des produits leveraged. Le TQQQ (3x Nasdaq) pèse désormais plus de 25 milliards de dollars. Les traders retail, boostés par les réseaux et les plateformes zero-fee, se ruent dessus. La SEC voit arriver la même vague sur la crypto et panique à l’idée d’un krach amplifié x5.

Ensuite, les performances désastreuses de certains produits 2x récents : le 2x MicroStrategy de Defiance a perdu plus de 70 % depuis son lancement, malgré la hausse de Bitcoin. Imaginez en 5x.

Enfin, le contexte politique. Même si Donald Trump revient à la Maison Blanche en janvier 2025, la SEC reste dirigée jusqu’à cette date par Gary Gensler, connu pour son aversion au risque retail. C’est maintenant ou jamais pour lui de poser des garde-fous.

Qu’est-ce qui reste autorisé ? Le nouveau plafond réel

Concrètement, après ce coup de balai :

  • Les ETF 2x (ex : BITX, ETHX de Volatility Shares) devraient survivre
  • Les 1.5x ou 1.75x ont encore de la marge
  • Les produits à levier variable ou « buffered » (type YieldMax) ne sont pas concernés
  • Les options covered-call (JEPI du pauvre version crypto) continuent leur ascension

Mais le rêve du 5x quotidien sur Bitcoin ou Solana aux États-Unis ? Repoussé sine die, voire enterré.

Et ailleurs dans le monde ?

L’Europe, le Canada et même Hong Kong avaient déjà des règles similaires ou plus strictes. La Suisse autorise certains 5x, mais uniquement pour les investisseurs qualifiés. Les États-Unis étaient paradoxalement le dernier grand marché à laisser la porte entrouverte.

Ce n’est plus le cas.

Les alternatives pour les traders accro au levier

Pas de panique pour les dégénérés du levier : les solutions existent toujours.

  • Les contrats futures perpétuels sur Binance, Bybit, OKX (jusqu’à 125x)
  • Les plateformes décentralisées type Hyperliquid ou dYdX (jusqu’à 50x)
  • Les tokens leveraged sur FTX 2.0 ou GMX (attention aux risques de liquidation)
  • Les CFD crypto chez les brokers régulés (Europe, Australie)

Seul hic : aucun de ces produits n’offre la simplicité fiscale et l’accès IRA d’un ETF américain. Pour les comptes retraite ou les investisseurs institutionnels, c’est une vraie perte.

Ce que ça change pour le marché crypto en 2026

À court terme, on risque de voir une rotation des flux : moins de folie spéculative retail, plus d’argent institutionnel dans les ETF spot classiques (IBIT, FBTC, etc.).

À moyen terme, les émetteurs vont probablement contourner la règle avec des produits « 2x reset hebdo » ou des stratégies à levier variable. On a déjà vu ce genre de créativité avec les ETF buffered.

Quant au 5x quotidien ? Il faudra probablement attendre un changement de majorité à la SEC… ou migrer ses positions offshore.

En attendant, le message est clair : aux États-Unis, le régulateur a décidé que le casino crypto, même emballé dans un bel ETF, avait ses limites. Et ces limites viennent d’être gravées dans le marbre.

À suivre de très près en 2026.

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