Imaginez un instant : un président qui tweete sur une cryptomonnaie, une envolée spectaculaire de 3 000 % en quelques heures, puis un crash brutal qui laisse 75 000 investisseurs dans le désarroi, avec plus de 280 millions de dollars partis en fumée. C’est l’histoire du scandale LIBRA, un memecoin qui secoue l’Argentine depuis février 2025. Aujourd’hui, le 9 avril 2025, les députés argentins ont décidé de ne plus rester les bras croisés : une enquête officielle est lancée.
Un Scandale qui Ébranle l’Argentine
Le 14 février dernier, Javier Milei, président de l’Argentine, a publié un message sur X vantant les mérites de LIBRA, présenté comme un outil pour “dynamiser l’économie argentine”. En un clin d’œil, le token a explosé, atteignant une capitalisation de 4,5 milliards de dollars. Mais la fête a été de courte durée : quelques heures plus tard, il perdait 90 % de sa valeur après que Milei a supprimé son tweet, prétendant ne pas connaître les détails du projet.
Ce revirement soudain a semé la panique. Les investisseurs, attirés par la promesse d’un soutien présidentiel, se sont retrouvés ruinés. Depuis, les accusations de manipulation et de fraude pleuvent, et le scandale prend une ampleur politique inattendue.
Une Enquête Parlementaire Historique
Le 8 avril 2025, la Chambre des députés argentins s’est réunie en session spéciale pour voter trois résolutions majeures. Avec 128 voix pour et 93 contre, ils ont approuvé la création d’une commission d’enquête dédiée au scandale LIBRA. Cette décision marque un tournant dans la gestion de cette crise qui mêle cryptomonnaie et politique.
Les trois mesures clés votées :
- Création d’une commission d’investigation pour analyser les origines et l’effondrement de LIBRA.
- Convocation de hauts responsables, dont le chef de cabinet Guillermo Francos et le ministre de l’Économie Luis Caputo.
- Demande de rapports détaillés au gouvernement sur son implication dans la promotion du token.
L’opposition, emmenée par des figures comme Maximiliano Ferraro, exige des réponses claires. “La société a le droit de savoir la vérité”, a-t-il déclaré lors des débats, soulignant l’urgence de transparence dans cette affaire explosive.
Les Origines du Chaos : Que s’est-il Passé ?
Tout commence avec un tweet présidentiel qui semblait anodin. Milei, connu pour ses positions libertariennes et son soutien aux cryptomonnaies, a présenté LIBRA comme une initiative privée pour stimuler l’économie locale. Mais les investigations ont vite révélé une autre réalité : des insiders, notamment la société Kelsier Ventures, auraient manipulé le marché dès le lancement.
LIBRA était censé financer les petites entreprises argentines, mais il a surtout enrichi ceux qui tiraient les ficelles en coulisses.
Un analyste anonyme du marché crypto
Les données montrent que Kelsier Ventures aurait empoché plus de 110 millions de dollars en profitant d’un accès privilégié aux tokens avant leur mise en circulation publique. Pendant ce temps, les petits investisseurs, séduits par la hype, ont tout perdu.
Les Acteurs Clés sous le Feu des Projecteurs
Qui sont les responsables ? Outre Milei, dont le rôle reste flou, plusieurs noms émergent. Kelsier Ventures, dirigée par Hayden Davis, est au cœur des accusations. Cette entreprise obscure aurait orchestré une manipulation de la liquidité, vidant les pools au détriment des acheteurs.
Les parlementaires ont également décidé de convoquer des figures majeures du gouvernement, comme Mariano Cúneo Libarona (ministre de la Justice) et Roberto Silva (chef de la Commission Nationale des Valeurs Mobilières). Leurs témoignages pourraient éclaircir les liens entre l’exécutif et ce fiasco.
Un Impact Politique et Économique Massif
Ce scandale ne se limite pas à une simple affaire de cryptomonnaie. Il fragilise Javier Milei, dont l’image anti-corruption était un pilier de sa campagne. À l’approche des élections de mi-mandat, cette crise pourrait coûter cher à son parti, La Libertad Avanza, déjà contesté par une opposition galvanisée.
Sur le plan économique, la perte de 280 millions de dollars pour 75 000 traders a ravivé les doutes sur la stabilité financière de l’Argentine. Un pays déjà en proie à une crise chronique voit sa réputation entachée par ce désastre numérique.
Les Poursuites Judiciaires s’Intensifient
Parallèlement à l’enquête parlementaire, les actions en justice se multiplient. Le 18 mars, le cabinet Burwick Law a déposé une plainte collective à New York contre Kelsier Ventures, KIP Protocol et Meteora. Les accusations ? Fraude, manipulation de liquidité et pratiques trompeuses.
Les principaux griefs de la plainte :
- 85 % de l’offre de tokens retenus par les développeurs.
- Retrait de liquidité orchestré pour piéger les investisseurs.
- Promesses fallacieuses d’un renouveau économique.
Ces poursuites font écho à une autre initiative en Argentine, où le procureur Eduardo Taiano a requis le gel de 110 millions de dollars d’actifs liés à LIBRA. Une chasse aux fonds s’engage, avec Interpol en renfort pour traquer les transactions internationales.
Les Leçons d’un Désastre Crypto
Le fiasco LIBRA soulève des questions cruciales sur la régulation des cryptomonnaies. Comment un memecoin peut-il mobiliser des milliards en quelques heures avant de s’effondrer ? La réponse réside dans une combinaison toxique : hype incontrôlée, manque de transparence et absence de garde-fous.
Les memecoins sont des paris risqués, mais quand un président s’en mêle, c’est une bombe à retardement.
Un trader argentin affecté
Pour beaucoup, ce scandale doit servir de signal d’alarme. Les appels à une régulation plus stricte se multiplient, tant en Argentine qu’à l’international. Aux États-Unis, une proposition de loi à New York vise déjà à criminaliser les “rug pulls” comme celui suspecté ici.
Et Maintenant ?
L’enquête parlementaire ne fait que commencer, mais ses implications pourraient redéfinir le paysage politique et crypto argentin. Milei, qui se voulait le héraut d’une révolution économique, risque de voir son mandat terni par ce fiasco. Quant aux investisseurs floués, ils espèrent justice, même si les chances de récupérer leurs fonds semblent minces.
Une chose est sûre : le scandale LIBRA restera dans les annales comme un exemple criant des dangers de la spéculation débridée. Reste à voir si l’Argentine tirera les leçons de cette débâcle ou si elle continuera à naviguer dans les eaux troubles de la crypto sans boussole.