Imaginez la scène : nous sommes fin novembre 2025, l’or vient de franchir un nouveau record historique à plus de 3 200 dollars l’once, soit une hausse vertigineuse de plus de 50 % depuis janvier. Pendant ce temps, Bitcoin, celui que l’on présente depuis quinze ans comme « l’or numérique », oscille mollement autour des 85 000 dollars après avoir perdu 11 % rien qu’en novembre. Comment expliquer un tel décalage ? Pourquoi l’actif millénaire explose-t-il pendant que l’actif révolutionnaire semble à bout de souffle ?
La réponse n’est pas dans la technologie, mais dans la psychologie des marchés et dans la nature profonde de ces deux actifs. L’or et Bitcoin ne sont pas des concurrents directs : ils répondent à des peurs différentes, à des temporalités différentes et surtout à des investisseurs différents. Décortiquons ensemble ce paradoxe fascinant.
2025 : l’année où l’or a retrouvé son statut de valeur refuge ultime
Pour comprendre la performance exceptionnelle de l’or cette année, il faut remonter à la source des angoisses mondiales. Depuis 2022, le monde vit sous une tension géopolitique permanente : guerre en Ukraine toujours active, conflit au Moyen-Orient, rivalité sino-américaine qui s’intensifie, sans oublier les incertitudes liées au retour de Donald Trump à la Maison Blanche.
Dans ce contexte, l’or redevient ce qu’il a toujours été : l’actif apolitique par excellence. Il n’a pas de président, pas de Fed, pas de sanctions possibles. Quand un pays veut diversifier ses réserves hors dollar, il achète de l’or. Point final.
Les banques centrales n’ont jamais acheté autant d’or
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon le World Gold Council, les banques centrales ont acquis plus de 1 100 tonnes d’or rien qu’au premier semestre 2025 – un record absolu. La Chine a annoncé avoir ajouté 225 tonnes à ses réserves officielles (et probablement bien plus en off-market). La Russie, l’Inde, la Turquie, la Pologne, la Hongrie… la liste est longue.
Cette ruée n’est pas un hasard. Elle traduit une défiance croissante envers le dollar et les monnaies occidentales. Quand Pékin ou Moscou achètent de l’or, ils envoient un message clair : ils préparent un monde où le billet vert ne sera plus forcément la monnaie de réserve incontestée.
« L’or est la seule monnaie qui ne peut pas être imprimée par une banque centrale en cas de crise. »
Ray Dalio, fondateur de Bridgewater Associates
L’inflation qui ne veut pas mourir
Même si les chiffres officiels américains affichent une inflation autour de 2,6-2,8 % fin 2025, la réalité ressentie par les ménages est bien différente. Logement, alimentation, énergie : beaucoup de postes restent très élevés. L’or, historiquement, performe quand la confiance dans la politique monétaire vacille.
Ajoutez à cela un dollar qui s’est affaibli de près de 12 % face à un panier de devises depuis janvier 2025 (effet Trump + anticipations de déficits explosifs), et vous obtenez la recette parfaite pour un rallye de l’or.
Facteurs clés qui soutiennent l’or en 2025 :
- Achats massifs des banques centrales (record historique)
- Dé-dollarisation accélérée (BRICS + pays émergents)
- Dollar affaibli (-12 % depuis janvier)
- Inflation réelle supérieure aux chiffres officiels
- Tensions géopolitiques permanentes
- Positionnement des investisseurs institutionnels (ETF or au plus haut)
Bitcoin, victime collatérale de la macroéconomie
Pendant que l’or profite d’une peur structurelle, Bitcoin subit une peur conjoncturelle. Et la conjoncture, fin 2025, est particulièrement hostile aux actifs risqués.
Premier coup dur : la Fed a revu à la baisse ses anticipations de baisses de taux. Au lieu des 4-5 cuts espérés début 2025, on parle désormais de 2, peut-être 3 en 2026. Moins de liquidités = moins d’appétit pour le risque.
Deuxième choc : l’annonce par Donald Trump de droits de douane massifs (60 % sur la Chine, 20 % sur le reste du monde). Les marchés actions ont plongé, entraînant dans leur sillage tous les actifs corrélés au Nasdaq – Bitcoin en tête.
Troisième facteur technique : la déboucle massive des carry trades yen. Quand le yen se renforce brutalement, les investisseurs qui empruntaient en yen pour acheter des actifs risqués (Bitcoin inclus) sont forcés de tout vendre. Résultat : des ventes en cascade.
Bitcoin reste (encore) un actif risqué, pas un refuge
C’est la grande différence avec l’or : Bitcoin reste perçu par les institutionnels comme un actif risque-on, pas risque-off. Quand tout va mal, on vend d’abord les cryptos, ensuite les techs, enfin les matières premières… l’or arrive en dernier recours.
Cette corrélation avec le Nasdaq reste extrêmement forte : +0,87 sur les douze derniers mois. Tant que Bitcoin se comporte comme une action tech à fort beta, il ne pourra pas prétendre au statut de valeur refuge.
« Bitcoin est de l’or numérique pour les millennials, mais l’or physique reste l’or pour les États et les boomers qui gèrent les réserves de change. »
Analyste anonyme de Goldman Sachs, novembre 2025
Les cycles respectifs des deux actifs
L’or n’a pas de halving. Il n’a pas de cycle de quatre ans. Sa rareté est géologique, pas algorithmique. Quand la peur monte, il monte. Quand la peur redescend, il consolide doucement. Résultat : des tendances longues, solides, prévisibles.
Bitcoin, lui, vit toujours dans l’ombre de son dernier halving (avril 2024). Historiquement, le pic arrive 12 à 18 mois après. Nous sommes donc théoriquement dans la phase finale du bull run… sauf que la macroéconomie en a décidé autrement.
Et demain ? Deux scénarios possibles
Scénario 1 – La grande décorrélation (haussier pour Bitcoin)
Si en 2026, la Fed est forcée de baisser massivement ses taux face à une récession américaine, Bitcoin pourrait connaître un rebond explosif. L’or consoliderait probablement après son énorme run, laissant la place à l’or numérique.
Scénario 2 – La nouvelle norme (or dominant)
Si la dé-dollarisation s’accélère et que les tensions géopolitiques restent élevées, l’or pourrait continuer sa marche en avant pendant que Bitcoin reste cantonné à un rôle d’actif spéculatif.
Comment profiter des deux mouvements avec une seule plateforme
Plutôt que de choisir entre l’or et Bitcoin, l’investisseur averti les combine. Des plateformes comme XTB permettent aujourd’hui d’acheter de l’or physique (via ETC), du Bitcoin, de l’Ethereum et plus de 6 000 autres actifs sur le même compte, avec des spreads très compétitifs et zéro commission sur de nombreux produits.
Dans l’incertitude actuelle, cette diversification entre or physique et or numérique apparaît comme la stratégie la plus robuste.
Car au final, l’or et Bitcoin ne sont pas ennemis. Ils sont complémentaires. L’un protège contre l’effondrement du système monétaire traditionnel. L’autre parie sur la construction d’un nouveau système. Les avoir tous les deux dans son portefeuille, c’est un peu comme miser à la fois sur la fin du monde… et sur le monde d’après.
