Malgré les clichés tenaces associant cryptomonnaies et activités criminelles, un rapport récent du Département du Trésor américain vient remettre les pendules à l’heure. Loin d’être l’outil privilégié des mafieux et cybercriminels pour blanchir l’argent sale, les crypto-actifs ne représentent qu’une infime partie des flux illicites. Le cash reste le roi incontesté pour les hors-la-loi de la finance !
La finance traditionnelle, paradis des criminels
Selon le rapport du Trésor US, c’est bien la finance traditionnelle, surnommée “TradFi”, qui facilite la circulation et le blanchiment des fonds illicites. Banques, sociétés de transferts internationaux, émetteurs de cartes prépayées… Tout l’écosystème financier classique est mis à contribution par les réseaux mafieux pour faire disparaître l’origine douteuse de leur argent.
Mais la méthode préférée des criminels reste le billet vert. Dépôts fractionnés, achats en liquide, “mules” chargées de transporter les liasses… Le cash offre un anonymat et une flexibilité imbattables pour les organisations criminelles. Le Trésor estime que le volume d’argent blanchi via la TradFi représente 2 à 5% du PIB mondial, soit 800 milliards à 2000 milliards de dollars ! Les banques américaines se tailleraient la part du lion dans ce business occulte.
La part des cryptos, anecdotique dans l’illégalité
À l’inverse, la proportion des activités illicites liées aux cryptomonnaies est dérisoire. D’après les données de Chainalysis, des adresses considérées comme illégales ont reçu pour 24,3 milliards de dollars de crypto-actifs en 2023, contre 39,6 milliards en 2022.
Rapporté au volume total des transactions crypto, cela ne représente que 0,34% en 2023. Un chiffre en constante diminution ces dernières années. Pour le Trésor US, “l’utilisation d’actifs virtuels pour le blanchiment d’argent reste bien en dessous de celle de la monnaie fiduciaire et des méthodes plus traditionnelles”.
La blockchain, un atout contre le blanchiment
Contrairement au cash, les transactions en cryptomonnaies laissent des traces indélébiles sur les blockchains publiques comme Bitcoin ou Ethereum. Ce suivi et ce traçage permanent des flux sont un atout majeur pour les enquêteurs. Les autorités arrivent de plus en plus à “suivre l’argent” et à remonter jusqu’aux criminels grâce aux données en blockchain.
Conscients de cette épée de Damoclès, de nombreux groupes criminels, comme le célèbre Lazarus, délaissent progressivement les cryptos. Le rapport note que “les criminels fuient un secteur où leurs activités sont plus facilement détectables et traçables”.
Un écosystème crypto qui se structure
L’industrie des cryptomonnaies a également fait de gros efforts ces dernières années pour coopérer avec les autorités et mettre en place des garde-fous. Les principales plateformes d’échange appliquent désormais des procédures de vérification d’identité poussée (KYC) et de lutte anti-blanchiment (AML).
De nombreux acteurs comme Chainalysis, Elliptic ou CipherTrace proposent des outils d’analyse de blockchain pour détecter les transactions suspectes. Les régulateurs exigent aussi des rapports d’activité détaillés de la part des entreprises crypto.
Oublier les clichés sur le Silk Road
Il est grand temps d’oublier le mythe du Silk Road et des premiers usages illicites de Bitcoin. Si les criminels essaient évidemment toutes les technologies à leur portée, les cryptomonnaies sont loin d’être leur terrain de jeu favori. Le bon vieux cash a encore de beaux jours devant lui dans le milieu…
Pour le Trésor US, “accuser la crypto de faciliter le blanchiment est aussi absurde que de pointer du doigt les téléphones portables parce qu’ils sont utilisés par les mafieux”. Un changement de regard bienvenu pour dissocier l’innovation technologique des usages détournés qu’elle peut occasionnellement subir. L’écosystème crypto n’est pas parfait, mais il ne mérite certainement pas son image sulfureuse !