Alors que le bitcoin traverse une période de turbulences, une nouvelle vient ébranler le marché : en l’espace de trois semaines, le gouvernement allemand a liquidé l’intégralité de ses réserves en bitcoins, soit l’équivalent de près de 3 milliards de dollars. Une décision lourde de conséquences, qui soulève de nombreuses questions. S’agit-il d’un formidable coup de poker stratégique ou au contraire d’une erreur historique ? Plongeons ensemble dans les dessous de cette affaire pour tenter d’y voir plus clair.
Le contexte : une saisie record en 2013
Revenons un instant sur l’origine de ces bitcoins détenus par l’Allemagne. En 2013, lors du démantèlement du célèbre site de streaming illégal Movie2k.to, la police fédérale allemande met la main sur un véritable trésor : 50 000 bitcoins, soit l’équivalent de 600 000 dollars à l’époque. Une saisie record, fruit d’un “transfert volontaire” de la part des suspects.
Mais 11 ans plus tard, ces mêmes bitcoins représentent la coquette somme de près de 3 milliards de dollars. De quoi donner le tournis… et visiblement pousser le gouvernement à agir. Mi-juin, les autorités entament la liquidation progressive de ce pactole numérique.
Un selling massif en 3 actes
En l’espace de seulement trois semaines, le gouvernement allemand va vider ses réserves de BTC au rythme effréné d’environ 16 000 unités par semaine. Les données de la blockchain sont formelles :
- Acte I : 15 075 BTC vendus entre le 15 et le 21 juin
- Acte II : 17 000 BTC supplémentaires liquidés du 22 au 28 juin
- Acte III : 13 000 BTC environ écoulés la semaine suivante
Jusqu’à la sentence finale, vendredi 12 juillet : selon le cabinet Arkham Intelligence, les adresses liées aux autorités allemandes affichent désormais un solde en bitcoins de… zéro. Les derniers BTC ont été transférés aux plateformes Flow Traders et 139Po.
Germany full stack dumping their seized BTC may go down as one of the biggest strategic blunders in history.
William Clemente III, Reflexivity Research
L’hypothèse du “Blunder” historique
Cette liquidation massive fait grincer des dents dans la communauté crypto. William Clemente III, cofondateur de Reflexivity Research, n’hésite pas à parler d’une des plus grosses “bourdes stratégiques de l’histoire”. Vendre plus de 45 000 BTC en trois semaines a eu un impact majeur sur le cours du bitcoin, en baisse de 18% sur la période.
Beaucoup y voient un manque de vision à long-terme. Car malgré sa volatilité, la plupart des analystes restent optimistes quant à l’avenir du bitcoin. Certains évoquent même des projections à 500 000 dollars d’ici 2030. Dans cette optique, l’Allemagne pourrait amèrement regretter son choix dans les prochaines années…
Ou une stratégie visionnaire ?
Mais il serait réducteur de considérer cette décision comme une simple bévue. Le timing interpelle : cette vente massive intervient au moment où Mt. Gox s’apprête à redistribuer 140 000 BTC à ses créanciers, après des années de bataille judiciaire. Dans le même temps, Genesis Trading liquide massivement ses actifs pour faire face à ses difficultés.
Tout laisse donc à penser que le gouvernement allemand a voulu prendre les devants, avant que le marché ne soit inondé et que les cours ne s’effondrent. Une forme de gestion de risque, en somme. Quitte à perdre de l’argent, autant limiter la casse en vendant avant tout le monde.
Pour résumer, deux lectures s’opposent concernant cette liquidation historique :
- Une erreur stratégique monumentale qui pourrait coûter très cher à l’État allemand
- Une décision visionnaire et rationnelle pour limiter l’exposition au risque crypto
Quid des autres gouvernements ?
Reste une question en suspens : l’Allemagne sera-t-elle imitée ? Car elle est loin d’être la seule à détenir d’importantes réserves en bitcoins. Les États-Unis, la Bulgarie ou encore l’Ukraine possèdent des milliers de BTC, saisis lors de diverses opérations policières.
Pour l’instant, aucun de ces pays n’a annoncé de projet similaire. Mais il ne fait guère de doutes que cette affaire sera scrutée avec attention par les gouvernements du monde entier. L’avenir nous dira si l’Allemagne a été téméraire… ou simplement visionnaire. Les paris sont ouverts !
