L’annonce récente par Ebay de la fermeture prochaine de sa place de marché NFT KnownOrigin a fait l’effet d’un séisme dans l’univers des cryptomonnaies. Au-delà de la disparition d’un acteur majeur, cet événement soulève des questions cruciales sur la fiabilité et la pérennité des solutions de stockage actuelles des tokens non fongibles.
KnownOrigin tire sa révérence
Fondé en 2018 à Manchester, KnownOrigin s’était rapidement imposé comme une référence dans le domaine de l’art numérique. La plateforme permettait aux artistes de frapper, vendre et échanger leurs oeuvres sous forme de NFT.
Son rachat en juin 2022 par le géant de l’e-commerce Ebay semblait lui promettre un avenir radieux. Mais moins de deux ans plus tard, patatras ! KnownOrigin annonce sa fermeture définitive, laissant ses utilisateurs dans l’expectative.
Les premiers signes avant-coureurs
Dès février 2024, la plateforme avait montré des signes de faiblesse en licenciant 30% de ses effectifs, dans un contexte de retournement du marché des NFT. Puis le couperet est tombé en juillet avec l’annonce officielle de sa mise en liquidation.
Le casse-tête du stockage des NFT
Si l’impact pour les utilisateurs reste à déterminer, cette nouvelle relance le débat sur la pérennité des oeuvres numériques. Car contrairement aux idées reçues, acheter un NFT ne garantit pas de posséder l’oeuvre sous-jacente de façon pérenne.
En réalité, la plupart des NFT ne stockent pas directement le visuel qu’ils représentent sur la blockchain. Ils contiennent seulement un lien pointant vers un fichier hébergé hors chaîne, le plus souvent sur IPFS (InterPlanetary File System).
Les limites d’IPFS
Si ce protocole décentralisé se veut plus résilient que les serveurs web classiques, il a ses limites. Comme l’explique l’artiste Ella aka BrightLightArt :
En effet, si l’entité en charge du noeud IPFS fait faillite ou cesse de le maintenir, les données peuvent devenir inaccessibles, rendant le NFT sans valeur. Un risque bien réel comme le prouve le cas KnownOrigin.
Réfléchir la propriété des NFT
Cette dépendance aux plateformes tierces pour la survie des NFT est une vulnérabilité majeure à adresser selon Jonty Wareing, chercheur en nouvelles technologies :
Ce que vous “achetez” réellement avec un NFT :
- Un jeton pointant vers une URL ou un hash IPFS
- Qui renvoie à un fichier JSON de métadonnées…
- Lui-même lié au média hébergé sur les serveurs de la plateforme !
En clair, en achetant un NFT, vous ne possédez pas l’oeuvre mais un simple lien, avec le risque qu’il pointe dans le vide si la plateforme disparaît. Une “maison en cartes” selon Jonty Wareing, qui estime que tous les NFT vendus jusqu’ici seront probablement “cassés” d’ici 10 ans.
Penser le stockage de demain
Face à ce constat alarmant, certains acteurs prônent l’usage de solutions de stockage alternatives comme Arweave. Contrairement à IPFS, ce protocole vise un stockage permanent contre un paiement unique. Les fichiers sont distribués sur un réseau décentralisé de façon théoriquement inaltérable.
Le recours à des blockchains dédiées pour héberger à la fois les métadonnées et les visuels des NFT pourrait être une autre piste, comme l’explique l’ingénieur Ethereum Sam :
Un électrochoc pour la communauté NFT
Au final, la disparition de KnownOrigin doit servir de piqûre de rappel. Elle montre l’importance de bien comprendre les mécanismes de stockage sous-jacents et les risques associés avant d’investir dans un NFT.
À mesure que la technologie évolue, il sera crucial pour les plateformes, les artistes et les collectionneurs de promouvoir des solutions de stockage plus pérennes et décentralisées. L’avenir et la crédibilité de l’art numérique en dépendent.
Cet épisode pourrait ainsi marquer un tournant salutaire, en poussant l’écosystème à construire des fondations plus solides, dans l’intérêt de tous. Une chose est sûre : le débat sur le stockage des NFT ne fait que commencer !