Depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche, les relations entre les États-Unis et l’Europe n’ont cessé de se tendre. Le Président américain multiplie les déclarations hostiles et menace notamment de taxer les importations européennes et chinoises si ces pays ne suivent pas la ligne américaine. Dans ce contexte géopolitique tendu, un nouveau front semble s’ouvrir dans la sphère des monnaies numériques.
En effet, l’administration Trump a récemment signé un décret visant à « renforcer le leadership américain dans la technologie financière numérique ». Ce texte met surtout l’accent sur la promotion de « stablecoins légaux et légitimes soutenus par le dollar » dans le monde entier.
Face à cette offensive américaine, la Banque Centrale Européenne (BCE) entend bien riposter. Piero Cipollone, membre du conseil d’administration de l’institution monétaire, a ainsi déclaré lors d’une réunion à Francfort qu’il fallait développer rapidement un euro numérique pour contrer les projets de Washington et préserver le rôle central des banques européennes.
L’euro numérique pour sauver les banques ?
Le responsable de la BCE craint en effet que la promotion agressive des stablecoins en dollars n’incite de plus en plus d’Européens à délaisser les banques traditionnelles au profit de ces crypto-actifs adossés au billet vert. Ce mouvement risquerait alors de faire « perdre leur rôle central aux banques qui vont perdre des clients et leurs sources de revenus », selon Piero Cipollone.
Pour contrer cette menace, le banquier central propose donc d’accélérer les travaux sur une monnaie numérique de banque centrale (MNBC) européenne, c’est-à-dire un euro numérique public émis directement par la BCE. Ce projet est à l’étude depuis plusieurs mois déjà mais son développement pourrait être accéléré face à l’urgence de la situation.
Une bataille pour la souveraineté monétaire
Au-delà de la survie du système bancaire européen, c’est bien la question de la souveraineté monétaire qui est en jeu. Avec la montée en puissance des stablecoins, de grands acteurs privés pourraient en effet s’arroger le pouvoir de création monétaire normalement dévolu aux banques centrales.
Si ces stablecoins sont de surcroît libellés en dollars, comme le souhaite l’administration Trump, cela reviendrait à accorder un immense privilège à la monnaie américaine. Le billet vert, déjà ultra-dominant dans les échanges internationaux, accentuerait encore son hégémonie.
Face à ce risque, la création d’un euro numérique souverain apparaît comme une riposte nécessaire pour les Européens. Reste à savoir si ce projet sera mené à bien assez rapidement pour contrer l’offensive des États-Unis et des géants de la tech dans la course aux monnaies numériques.
Des défis techniques et politiques
Le chemin est encore long avant de voir un euro numérique dans le portefeuille des citoyens européens. De nombreux défis techniques doivent encore être relevés, notamment en termes de sécurité, de respect de la vie privée et de scalabilité pour permettre un usage massif.
Mais les obstacles sont aussi politiques. Tous les pays de la zone euro devront se mettre d’accord sur les modalités de cette MNBC. Certains comme l’Allemagne sont encore réticents, craignant qu’un euro numérique ne déstabilise le système bancaire.
La BCE devra donc convaincre les États membres de l’urgence et de la nécessité de ce projet face aux menaces extérieures. Un défi de taille dans une Europe souvent divisée, mais un enjeu crucial pour ne pas laisser le dollar régner sans partage sur la finance numérique de demain.
En résumé :
- Face à l’offensive des États-Unis pour promouvoir les stablecoins en dollars, la BCE veut riposter avec un euro numérique
- L’objectif est de préserver le rôle des banques européennes et la souveraineté monétaire de la zone euro
- De nombreux défis techniques et politiques restent à relever avant le lancement d’une telle monnaie numérique de banque centrale