Imaginez que vous ayez investi dans une startup crypto en 2017, quand personne n’y croyait encore. Vous avez bloqué des dizaines de milliers de dollars dans un token appelé MCO, vous avez reçu une superbe carte noire Obsidian avec la promesse solennelle que les avantages seraient à vie. Huit ans plus tard, vous ouvrez votre application un matin et… tout a disparu. Plus de cashback, plus de lounge aeroport, plus de frais de change à 0 %. Juste un message laconique : « changement de direction business ». C’est exactement ce qui arrive en ce moment à des centaines de « founding members » de Crypto.com.
Le scandale qui fait trembler Crypto.com en décembre 2025
Le coup est parti d’un long post Reddit signé Founding Member #647. L’homme raconte avoir découvert par hasard que tous les bénéfices historiques liés à son statut de tout premier soutien avaient purement et simplement été supprimés. Pas d’email, pas de notification push, pas même un bandeau dans l’application. Juste le vide.
En quelques heures, des dizaines d’autres pionniers de l’époque Monaco (l’ancien nom de Crypto.com) ont confirmé la même chose. La colère est immense, parce que ces avantages n’étaient pas un simple bonus marketing : ils étaient le cœur même du deal fondateur.
Retour en 2017 : quand Monaco vendait du rêve « à vie »
À l’époque, Monaco était une petite startup de Singapour qui levait des fonds pour créer la « meilleure carte crypto du monde ». Pour attirer les premiers investisseurs, l’équipe avait mis en place un programme ultra-exclusif : les 500 premiers + les 500 plus gros contributeurs devenaient Founding Members.
En échange de 50 000 $ bloqués en MCO (le token d’origine), vous receviez :
- La carte Obsidian noire (la plus rare)
- 8 % de cashback en crypto sur TOUTES les dépenses
- Zéro frais de change à l’étranger
- Accès illimité aux salons d’aéroport (lounge)
- Remboursement Netflix, Spotify, Amazon Prime
- Et surtout : ces avantages étaient garantis à vie
Le livre blanc et les emails officiels de l’époque répétaient sans cesse le mot lifetime. Des milliers de personnes ont accepté de bloquer leurs fonds pendant des années précisément pour ça.
« Nous avons construit cette entreprise avec nos premiers supporters. Leurs avantages seront protégés pour toujours. »
Email officiel Monaco, juillet 2017
Novembre 2025 : la douche froide
Fin novembre, les founding members reçoivent une notification anodine : leur carte arrive à expiration et sera renouvelée automatiquement. Sauf que la nouvelle carte qui arrive… est une simple carte Ruby Steel ou Jade Green. Plus d’Obsidian. Plus aucun avantage premium.
Le support client répond à tous la même phrase robot :
« Suite à un changement de direction business, les avantages historiques ne sont plus applicables. »
Aucun dédommagement, aucune période de transition, aucune communication officielle. Juste la suppression pure et simple après huit ans de fidélité.
Une suppression progressive… mais silencieuse
En creusant, on se rend compte que ce n’est pas totalement soudain. Ces dernières années, Crypto.com avait déjà commencé à rogner les avantages :
- 2021 : cashback passé de 8 % à 5 % puis 3 %
- 2022 : suppression du remboursement Spotify/Netflix pour les anciennes cartes
- 2023 : limitation des lounges à 12 par an puis suppression totale
- 2025 : disparition complète du statut founding member
Mais jamais la plateforme n’avait osé toucher aux cartes Obsidian des tout premiers. Jusqu’à aujourd’hui.
La communauté parle de « rug silencieux »
Sur Reddit, le thread a dépassé les 5000 upvotes en 48 heures. Les commentaires sont cinglants :
- « C’est pire qu’un rug pull : au moins avec un rug on sait tout de suite qu’on s’est fait avoir »
- « J’ai bloqué 50 BTC en 2017 pour ça… aujourd’hui ma carte vaut moins qu’une Revolut Metal »
- « Kris Marszalek avait promis à vie. Il a juste oublié de préciser la durée de vie… de la promesse »
Certains ont même ressorti des captures d’écran des livestreams de 2018 où Kris Marszalek, le CEO, répétait : « Lifetime means lifetime. We will never touch founding members benefits ».
Crypto.com est-il encore digne de confiance ?
Le problème va bien au-delà des quelques millions de dollars de cashback perdu. C’est une question de confiance fondamentale.
Dans une industrie où tout repose sur la réputation, traiter ainsi ses tout premiers supporters envoie un signal désastreux. Surtout quand on sait que Crypto.com a dépensé des centaines de millions en sponsoring (stade des Lakers, UFC, Formule 1…) pendant que ses pionniers perdaient leurs avantages un par un.
Le paradoxe Crypto.com en 2025
- Investit 700 millions pour renommer le Staples Center
- Paie Matt Damon pour dire « Fortune favors the brave »
- Mais supprime en silence les avantages promis à ceux qui ont cru en eux quand ils n’avaient rien
Vers une fuite des utilisateurs historiques ?
Déjà, on voit des founding members transférer massivement leurs CRO vers d’autres plateformes. Certains parlent même de vendre leurs tokens par principe.
Paradoxalement, pendant ce temps-là, des projets plus jeunes comme Pepenode ou Solana font exactement l’inverse : ils sur-récompensent leurs premiers supporters et communiquent avec une transparence totale.
Le contraste est violent.
Que peut faire un founding member lésé ?
Concrètement, les options sont limitées :
- Action collective ? Peu probable, les CGU ont été modifiées plusieurs fois
- Arbitrage à Singapour ? Coûteux et incertain
- Vendre ses CRO et partir ? C’est ce que beaucoup font déjà
- Faire du bruit sur les réseaux ? C’est actuellement la seule arme
Mais le vrai dommage est irréparable : la confiance est brisée. Et dans la crypto, quand la confiance part, elle ne revient jamais.
Le mot de la fin
Huit ans après avoir cru en un projet quand il n’était encore qu’une promesse, les founding members de Crypto.com se retrouvent avec une carte plastique basique et le sentiment amer d’avoir été trahis.
Cette histoire nous rappelle une vérité cruelle mais essentielle dans la crypto : les seules promesses qui comptent sont celles gravées dans le code. Tout le reste – les « à vie », les beaux discours, les vidéos YouTube – peut disparaître du jour au lendemain sur décision d’un board quelque part à Singapour.
Les cryptoactifs représentent un investissement risqué. Mais parfois, le plus grand risque, ce n’est pas le marché. C’est de faire confiance à une entreprise centralisée.
