Et si les régulateurs financiers américains cachaient délibérément des informations cruciales sur leurs efforts pour freiner l’essor des cryptomonnaies ? C’est la question brûlante que soulève Coinbase, l’une des plus grandes plateformes d’échange crypto au monde, en relançant son procès contre la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC). Cette bataille juridique, qui reprend de plus belle en ce printemps 2025, pourrait bien révéler des pratiques opaques et bouleverser la relation entre les banques et l’univers des actifs numériques.
Coinbase Face à la FDIC : Une Lutte pour la Vérité
Le 31 mars 2025, Coinbase a déposé une motion auprès du tribunal de district de Washington D.C. pour reprendre son procès basé sur la loi sur la liberté d’information (Freedom of Information Act, ou FOIA). L’objectif ? Forcer la FDIC à dévoiler des documents qu’elle aurait, selon la plateforme, volontairement dissimulés. Ces documents concernent notamment des échanges entre l’agence et les banques, incluant les fameuses « lettres de pause » qui auraient poussé les institutions financières à suspendre leurs activités liées aux cryptomonnaies.
Un Contexte de Tension Croissante
Cette démarche n’est pas nouvelle. En juin 2024, Coinbase avait déjà intenté une action en justice contre la FDIC et la Securities and Exchange Commission (SEC), accusant ces organismes de bloquer l’accès de l’industrie crypto au système bancaire traditionnel. Après une pause en février 2025, liée à l’arrivée de Travis Hill comme président par intérim de la FDIC sous l’administration Trump, les espoirs d’une résolution à l’amiable s’étaient ravivés. Hill avait promis une transparence accrue, mais pour Coinbase, ces promesses restent lettre morte.
« Tant que le gouvernement ne cédera pas, Coinbase non plus. Nous continuerons à exiger la transparence que le public mérite. »
Paul Grewal, directeur juridique de Coinbase
Paul Grewal, le directeur juridique de Coinbase, a récemment confié à la journaliste Eleanor Terrett que, malgré une légère amélioration dans les échanges avec la FDIC, le compte n’y est toujours pas. Cette insatisfaction a poussé la plateforme à rouvrir le dossier judiciaire, espérant que le tribunal obligera l’agence à jouer cartes sur table.
Les « Lettres de Pause » au Cœur du Litige
Le nœud du problème réside dans ces fameuses « lettres de pause », émises par la FDIC entre mars 2022 et mai 2023. Selon un rapport de l’inspecteur général de l’agence datant d’octobre 2023, ces courriers demandaient aux banques sous supervision de suspendre toute activité liée aux cryptomonnaies, sans préciser de calendrier pour une éventuelle reprise. Pour Coinbase, ces directives ne visaient pas à réguler, mais à étrangler l’industrie naissante des actifs numériques.
Ce que révèlent les documents déjà obtenus :
- La FDIC a conseillé aux banques de « mettre en pause » leurs services crypto.
- Aucune explication claire n’a été fournie sur la durée de cette suspension.
- Ces mesures auraient été prises sans consultation publique, contrairement aux usages légaux.
Ces révélations, bien que partielles, renforcent la thèse de Coinbase selon laquelle la FDIC participerait à une opération plus large, surnommée « Operation Chokepoint 2.0 ». Ce terme, inspiré d’une initiative controversée de 2013 visant à couper les services bancaires à certaines industries jugées risquées, désigne ici une tentative présumée des régulateurs pour isoler le secteur crypto du système financier.
Un Changement de Cap Réglementaire ?
Pourtant, le vent semble tourner. Fin mars 2025, la FDIC a annoncé un assouplissement de sa politique : les banques sous sa juridiction peuvent désormais s’engager dans des activités crypto sans approbation préalable, à condition de gérer les risques associés. Cette décision marque un virage par rapport à la prudence affichée sous l’administration précédente, et certains y voient une réponse indirecte aux pressions exercées par Coinbase et d’autres acteurs du secteur.
Mais pour Coinbase, cet assouplissement ne suffit pas. L’entreprise insiste sur la nécessité de comprendre les actions passées de la FDIC, notamment les restrictions imposées en secret. Pourquoi ? Parce que ces pratiques pourraient avoir durablement entravé l’innovation dans le domaine des cryptomonnaies aux États-Unis, au profit d’autres juridictions plus accueillantes.
Operation Chokepoint 2.0 : Mythe ou Réalité ?
L’idée d’une « Operation Chokepoint 2.0 » ne date pas d’aujourd’hui. Dès 2023, des acteurs de l’industrie crypto, comme la banque Custodia basée dans le Wyoming, avaient dénoncé des pressions similaires exercées par la Réserve fédérale et d’autres régulateurs. Coinbase va plus loin en affirmant que les « lettres de pause » de la FDIC s’inscrivent dans une stratégie coordonnée pour marginaliser les entreprises du secteur.
Si cette théorie se confirme, les implications seraient énormes. Non seulement cela mettrait en lumière une possible collusion entre agences fédérales, mais cela soulèverait aussi des questions sur la légalité de telles pratiques. En effet, aux États-Unis, les régulateurs sont tenus de justifier leurs décisions et de permettre un débat public – ce qui, selon Coinbase, n’a pas été le cas ici.
Les Enjeux pour l’Industrie Crypto
Ce procès dépasse largement le cadre d’un simple différend entre Coinbase et la FDIC. Il s’agit d’une lutte pour l’avenir des cryptomonnaies aux États-Unis. Si la plateforme parvient à obtenir les documents demandés, cela pourrait non seulement exposer des pratiques douteuses, mais aussi pousser les législateurs à clarifier les règles du jeu pour les actifs numériques.
Pourquoi ce procès est crucial :
- Rétablir la confiance entre les banques et les entreprises crypto.
- Prévenir de futures restrictions arbitraires.
- Favoriser un cadre réglementaire transparent et équitable.
À l’heure actuelle, le flou réglementaire freine l’adoption massive des cryptomonnaies. Les banques hésitent à collaborer avec des plateformes comme Coinbase, craignant des représailles de la part des régulateurs. En obtenant gain de cause, Coinbase pourrait ouvrir la voie à une intégration plus harmonieuse des actifs numériques dans le système financier traditionnel.
Une Bataille qui Mobilise
Ce combat juridique ne se limite pas à Coinbase. D’autres acteurs, comme la firme History Associates Incorporated, soutiennent cette cause. Cette dernière a également déposé une motion le 31 mars 2025 pour reprendre son propre procès FOIA contre la FDIC, dénonçant le manque de coopération de l’agence dans la divulgation de ses méthodes de recherche et de conservation de documents.
« La transparence n’est pas négociable. Les régulateurs doivent rendre des comptes au public. »
Un représentant de History Associates
Cette convergence d’efforts montre à quel point la question de la transparence est devenue centrale pour l’écosystème crypto. Les entreprises du secteur ne demandent pas l’absence de régulation, mais une régulation claire, prévisible et juste – un objectif qui semble encore hors de portée face à l’opacité des agences comme la FDIC.
Les Prochaines Étapes du Procès
La FDIC a désormais deux semaines pour répondre à la motion de Coinbase, soit jusqu’à mi-avril 2025. Si le tribunal donne raison à la plateforme, l’agence devra produire les documents demandés, potentiellement dès cet été. Mais si elle persiste dans son refus, le conflit pourrait s’éterniser, voire escalader jusqu’à des instances supérieures.
Entre-temps, les regards se tournent vers Travis Hill. Sa nomination avait suscité l’optimisme, mais sa capacité à tenir ses engagements reste en question. Pour beaucoup, ce procès sera un test décisif de sa volonté de « tourner la page », comme il l’a lui-même déclaré lors de l’annonce de la nouvelle politique crypto de la FDIC.
Un Précédent pour l’Avenir
Quel que soit le dénouement, cette affaire marquera un tournant. Une victoire de Coinbase pourrait inciter d’autres entreprises crypto à contester les régulateurs, tandis qu’un échec renforcerait le pouvoir discrétionnaire des agences fédérales. Dans tous les cas, l’issue influencera la manière dont les États-Unis abordent la régulation des cryptomonnaies à l’ère post-COVID, où l’économie numérique prend une place croissante.
Pour les investisseurs et les utilisateurs de cryptomonnaies, ce procès est aussi un rappel : derrière les fluctuations des cours et les promesses de décentralisation, se joue une bataille pour le contrôle et la légitimité. Coinbase, en relançant ce combat, ne se bat pas seulement pour elle-même, mais pour tout un secteur qui refuse de se laisser étouffer.
Et Après ?
Alors que le tribunal de Washington D.C. se prépare à trancher, une question demeure : jusqu’où ira Coinbase pour obtenir la vérité ? Et surtout, que révélera cette vérité sur les intentions réelles des régulateurs américains ? Une chose est sûre : les mois à venir seront décisifs pour l’avenir des cryptomonnaies aux États-Unis.
À retenir de cette affaire :
- Coinbase relance son procès FOIA contre la FDIC le 31 mars 2025.
- Les « lettres de pause » sont accusées de bloquer l’accès bancaire au secteur crypto.
- L’issue pourrait redéfinir la régulation des actifs numériques aux USA.
En attendant, le secteur crypto retient son souffle. Et vous, pensez-vous que Coinbase obtiendra gain de cause ? Ou les régulateurs garderont-ils leurs secrets bien enfouis ? L’histoire est loin d’être finie.