Imaginez un instant que le mot « Internet » soit la propriété d’une entreprise privée. Impensable n’est-ce pas ? C’est pourtant ce qu’a tenté de faire Matter Labs, la société derrière la solution de scaling zkSync sur Ethereum, en déposant une demande de marque pour le terme « ZK ». Une initiative qui a immédiatement déclenché un tollé au sein de la communauté crypto.
Le terme « ZK » doit rester libre selon les chercheurs
ZK est l’abréviation de « preuve à connaissance nulle » (zero-knowledge proof), une technologie cryptographique révolutionnaire permettant de prouver quelque chose sans révéler aucune autre information. Un outil précieux pour préserver la confidentialité et l’anonymat sur les blockchains publiques.
Pour les pionniers de la recherche sur les ZK comme Shafi Goldwasser, Silvio Micali ou Eli Ben-Sasson, il est inconcevable qu’une entreprise puisse s’approprier ce terme. Dans une lettre ouverte, ces figures incontournables du domaine ont fermement condamné l’initiative de Matter Labs :
Les signataires de la lettre dont Sandeep Nailwal, cofondateur de Polygon, ont averti Matter Labs que poursuivre dans cette voie reviendrait à se couper de la communauté dont elle prétend faire partie. Un avertissement on ne peut plus clair.
Matter Labs fait machine arrière
Devant l’ampleur des réactions, Matter Labs n’a eu d’autre choix que de rapidement abandonner ses velléités de marque. Trois jours seulement après la publication de la lettre ouverte, la firme annonçait retirer toutes ses demandes de marques liées à « ZK ».
Dans un post sur X (ex-Twitter), Matter Labs a expliqué que ces échanges avec la communauté l’ont amené à un constat important :
Il serait impossible de parvenir à un consensus sur un groupe de personnes considérées comme impartiales de façon crédible et quasi-universelle. Ce qui a fonctionné pour Ethereum ne s’applique pas nécessairement au monde entier.
Matter Labs avait initialement justifié ces dépôts de marque par une volonté de s’assurer que ZK puisse être librement utilisé en conjonction avec « ZK Sync », « ZK Stack » et d’autres noms associés à l’entreprise. Un argument juridique qui n’a pas convaincu la communauté.
La communauté veille au grain
Cet épisode démontre une nouvelle fois la vigilance et la capacité de mobilisation de l’écosystème crypto lorsque ses valeurs fondamentales sont menacées. Ouverts et décentralisés par nature, les projets blockchain ne peuvent se permettre de tourner le dos aux principes qui les animent sous peine de perdre tout crédit.
Il envoie également un message clair aux entreprises tentées de s’approprier des innovations issues des cryptos pour leur bénéfice exclusif. La communauté n’hésitera pas à monter au créneau pour défendre le caractère libre et accessible des technologies clés comme les preuves à connaissance nulle.
Espérons que la leçon servira et que les acteurs de l’industrie se concentreront sur le développement et la démocratisation des solutions blockchain plutôt que sur des batailles juridiques stériles. Les défis à relever sont immenses et nécessitent la collaboration de tous, dans un esprit d’ouverture et de partage. C’est à ce prix que la promesse révolutionnaire des cryptos pourra devenir réalité.