Imaginez une salle comble à l’Assemblée nationale, l’air chargé de tension, et un vote qui se joue à quelques voix près. C’est exactement ce qui s’est passé mardi 9 décembre 2025 avec l’adoption du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026. Un texte passé sans le fameux 49.3, mais qui laisse un goût amer à de nombreux Français, notamment ceux qui investissent dans les cryptomonnaies.
Ce budget, validé par 247 voix contre 234, marque une étape dans un paysage politique fracturé depuis la dissolution de juin 2024. Mais au-delà des jeux d’alliances, c’est bien la fiscalité qui retient l’attention, avec une hausse ciblée sur les revenus du capital qui touche directement les actifs numériques.
Un vote serré qui ouvre la voie à de nouvelles taxes
Le Premier ministre Sébastien Lecornu peut se féliciter d’avoir évité le recours à l’article constitutionnel controversé. En ralliant des voix socialistes, centristes et même certaines républicaines, le gouvernement a sauvé ce texte crucial. Pourtant, cette victoire étroite ne masque pas les concessions majeures consenties pour obtenir ces soutiens.
Le déficit de la Sécurité sociale est ainsi ramené à environ 19,5 milliards d’euros, grâce notamment à une contribution exceptionnelle de l’État de 4,5 milliards. Mais pour financer cela, le gouvernement a dû accepter une augmentation significative de la pression fiscale sur une partie des revenus du capital.
La CSG en hausse : un coup dur pour les investisseurs crypto
L’une des mesures phares issues d’un compromis avec les socialistes porte sur la Contribution sociale généralisée appliquée aux revenus du patrimoine. Le taux passe de 9,2 % à 10,6 %, soit une augmentation de 1,4 point. Conséquence directe : le prélèvement forfaitaire unique, plus connu sous le nom de Flat Tax, grimpe à 31,4 % sur les produits concernés.
Cette hausse touche les dividendes, les plus-values sur actions en compte-titres, et bien entendu les gains réalisés sur les cryptomonnaies. Pour les holders et traders français, c’est une mauvaise nouvelle qui alourdit la facture fiscale au moment de déclarer leurs opérations.
Produits impactés par la hausse du PFU à 31,4 % :
- Dividendes d’actions détenues en compte-titres
- Plus-values de cession d’actions
- Gains en capital sur cryptomonnaies (Bitcoin, Ethereum, etc.)
- Intérêts de certains placements
Produits épargnés (pour l’instant) grâce à un amendement :
- Assurance-vie
- Revenus fonciers
- Plans d’épargne réglementés (Livret A, PEL, etc.)
Cette exclusion temporaire des produits d’épargne populaires a été décisive pour apaiser les craintes des ménages modestes. Mais nombreux sont ceux qui s’interrogent : cette protection durera-t-elle face aux besoins croissants de financement de la dépendance et de l’autonomie ?
Une taxe supplémentaire qui vise à financer l’autonomie, mais qui pénalise ceux qui prennent des risques en investissant dans l’innovation.
Un investisseur anonyme sur les réseaux sociaux
Des avancées sociales pour acheter la paix parlementaire
Pour sécuriser les voix manquantes, l’exécutif a dû lâcher du lest sur plusieurs dossiers sensibles. Ces reculs et avancées sociales modifient profondément le paysage pour des millions de Français.
Premier point majeur : la suspension de la réforme des retraites portée par le gouvernement précédent. L’âge légal reste bloqué à 62 ans et 9 mois, et le nombre de trimestres requis pour une pension à taux plein est gelé à 170 jusqu’en 2028 au moins.
Des améliorations ont également été apportées pour les femmes, avec la validation de trimestres supplémentaires pour enfant dans le dispositif carrières longues du privé. Une mesure saluée par les associations familiales.
Congé naissance : une mesure familiale bienvenue
Autre avancée concrète : l’entrée en vigueur anticipée, dès le 1er janvier 2026, du congé naissance. Chaque parent bénéficiera de deux mois indemnisés, en complément des congés maternité et paternité existants.
Cette disposition vise à mieux accompagner les jeunes parents et à encourager la natalité dans un contexte démographique préoccupant. Elle représente un coût supplémentaire pour la branche famille, mais a été vue comme un geste fort envers les familles.
Santé : un ONDAM rehaussé mais toujours contraint
Dans le domaine de la santé, l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie a été porté à 3 % après négociations. Un chiffre plus réaliste que la version initiale, même s’il reste inférieur aux 3,6 % de l’année précédente.
Certaines mesures impopulaires ont été abandonnées : le doublement des franchises médicales et le gel des minimas sociaux ne figurent plus dans le texte final. Un soulagement pour les ménages les plus modestes.
En revanche, un encadrement plus strict des arrêts de travail a été maintenu. Désormais, le premier arrêt est limité à un mois, avec obligation de nouvelle consultation pour tout renouvellement. Objectif affiché : lutter contre les abus et contrôler la dépense en indemnités journalières.
Les cryptomonnaies dans le viseur fiscal
Pour les détenteurs de Bitcoin, Ethereum ou autres altcoins, cette réforme fiscale n’est pas anodine. Les plus-values réalisées lors de la vente de cryptomonnaies détenues sur des plateformes étaient déjà soumises au PFU de 30 %. Avec cette hausse à 31,4 %, chaque cession deviendra un peu plus coûteuse.
Cette mesure s’inscrit dans une tendance plus large de renforcement de la fiscalité sur les actifs risqués. Le gouvernement justifie cela par la nécessité de faire contribuer les revenus du capital au financement de la protection sociale, dans un contexte où les cryptomonnaies représentent une part croissante du patrimoine de certains Français.
Mais pour beaucoup d’investisseurs, c’est une forme de pénalisation de ceux qui cherchent à diversifier leurs placements au-delà des produits d’épargne traditionnels encadrés et moins rentables.
Impact concret sur un gain crypto :
Avant 2026 : Gain de 10 000 € → Taxe de 3 000 € (30 %)
À partir de 2026 : Gain de 10 000 € → Taxe de 3 140 € (31,4 %)
Soit 140 € de plus par tranche de 10 000 € de plus-value.
Une instabilité politique qui pèse sur l’économie
Ce vote laborieux illustre parfaitement les difficultés du pouvoir exécutif à gouverner depuis plus d’un an. La dissolution de l’Assemblée en juin 2024 a fragmenté la majorité et rendu chaque texte budgétaire extrêmement compliqué à faire passer.
Le texte adopté doit maintenant passer au Sénat, puis probablement en commission mixte paritaire. Rien ne garantit qu’il sorte indemne de cette navette parlementaire. Et derrière, plane déjà le spectre du Projet de loi de finances pour le budget de l’État, encore plus clivant.
Face à ces blocages récurrents, certains au gouvernement évoquent déjà la possibilité d’un projet de loi temporaire reconduisant les recettes et dépenses de 2025 en cas d’impasse totale. Une solution technique qui éviterait la paralysie, mais qui témoignerait d’une forme d’impuissance politique.
La fatigue des Français face à l’errance politique
Au-delà des chiffres et des compromis parlementaires, c’est bien une lassitude générale qui transparaît. Travailleurs, entrepreneurs, jeunes diplômés, agriculteurs : beaucoup aspirent à des solutions concrètes plutôt qu’à des marchandages incessants à l’Assemblée.
Ce budget de la Sécurité sociale, même adopté, ne résout pas les problèmes structurels : vieillissement de la population, financement de la dépendance, attractivité économique du pays. Il repousse certaines décisions difficiles tout en augmentant la pression fiscale sur une catégorie d’investisseurs.
Pour la communauté crypto française, déjà confrontée à un cadre réglementaire strict via le PSAN et les obligations déclaratives, cette hausse fiscale vient s’ajouter à une liste de contraintes. Certains y verront un signal supplémentaire pour envisager des stratégies d’optimisation ou même une délocalisation fiscale.
Nous investissons dans l’avenir avec les cryptomonnaies, mais l’État nous traite comme une vache à lait.
Un trader français anonyme
Perspectives pour les investisseurs en cryptomonnaies
Face à cette évolution fiscale, plusieurs stratégies peuvent être envisagées. Tout d’abord, privilégier les détentions à long terme pour reporter l’imposition. Ensuite, explorer les enveloppes fiscales encore protégées, même si elles restent limitées pour les actifs numériques purs.
Certains experts recommandent également de diversifier géographiquement ses avoirs, en profitant des juridictions plus favorables en Europe ou ailleurs. Mais cela implique des contraintes supplémentaires en termes de déclaration et de conformité.
À plus long terme, cette mesure pourrait freiner l’adoption des cryptomonnaies en France, au moment même où d’autres pays européens adoptent des cadres plus incitatifs. Un paradoxe pour un pays qui se veut pionnier en matière de régulation avec MiCA.
Conclusion : un pas de côté plutôt qu’un grand bond
L’adoption du PLFSS 2026 marque une étape dans la navigation à vue du gouvernement. Des avancées sociales notables côtoient une fiscalité alourdie sur les actifs risqués, dont les cryptomonnaies font les frais.
Si le texte évite le blocage institutionnel, il ne restaure pas la confiance dans une majorité stable ni ne répond aux défis structurels du pays. Pour les investisseurs crypto, c’est un rappel supplémentaire que la fiscalité reste un paramètre crucial dans toute stratégie d’investissement.
Dans ce contexte incertain, une chose est sûre : la vigilance s’impose plus que jamais. Suivre l’évolution du texte au Sénat, anticiper les prochaines échéances budgétaires, et adapter ses choix en conséquence deviendront des réflexes indispensables pour naviguer dans cette nouvelle réalité fiscale française.
