Coup de froid sur les cryptomonnaies en Espagne. Les autorités viennent d’annoncer le gel de pas moins de 26,4 millions de dollars d’actifs numériques, dans le cadre d’une vaste opération anti-blanchiment menée à l’échelle européenne. Une saisie record qui marque un tournant dans la lutte contre la criminalité liée aux cryptos, mais qui soulève aussi des questions sur la sécurité de certains réseaux comme Tron.
Un coup de filet européen
C’est un véritable coup de maître qu’ont réalisé les forces de l’ordre espagnoles. En collaboration avec Europol, Eurojust et surtout l’unité spéciale T3 Financial Crime, elles ont réussi à mettre la main sur 26,4 millions de dollars de cryptomonnaies. Des fonds qui selon les enquêteurs, étaient liés à une importante organisation criminelle opérant dans plusieurs pays d’Europe.
L’opération, qui s’est déroulée principalement en Espagne et à Chypre, a mobilisé plus de 50 personnes travaillant de concert pour blanchir de l’argent sale. Leur mode opératoire : recevoir des fonds illicites puis les « laver » via différentes sociétés-écrans et transactions en cryptos, avant de les réinjecter dans l’économie légale.
Le plus gros coup de filet du T3 Financial Crime
Si cette saisie est historique, c’est aussi parce qu’elle constitue le plus gros succès à ce jour pour l’unité T3 Financial Crime. Lancée en août 2024 par les projets Tron, Tether et TRM Labs, cette cellule spéciale se consacre à la traque des flux illicites sur les blockchains.
En à peine 5 mois d’existence, le bilan est éloquent : 126 millions de dollars d’avoirs criminels gelés. Une prouesse permise par un partage d’informations et une coordination inédite entre acteurs publics et privés du monde crypto.
L’unité T3 Financial Crime en chiffres :
- 3 acteurs à l’origine : Tron, Tether et TRM Labs
- 52 enquêteurs et analystes à temps plein
- 126 millions de dollars gelés en 5 mois
- Une quarantaine de pays couverts
Tron et Tether dans le viseur
Mais cet impressionnant coup de filet ne doit pas faire oublier un constat gênant : la blockchain Tron reste la destination privilégiée des transactions suspectes. En effet, selon TRM Labs, 58% des activités illicites détectées se concentrent sur ce réseau.
Et dans le sillage de Tron, c’est aussi le stablecoin USDT de Tether qui se retrouve éclaboussé. Malgré sa capacité à geler les fonds douteux, l’USDT demeure un vecteur majeur des flux frauduleux, du fait de sa prédominance sur le réseau Tron (60 milliards de dollars de capitalisation).
Reste que le travail accompli par l’unité T3 pour renforcer la sécurité de Tron commence à porter ses fruits. Selon TRM Labs, le volume des transactions suspectes a baissé de 6 milliards de dollars sur le réseau. Un premier pas encourageant, mais le chemin est encore long pour restaurer la confiance.
La criminalité crypto s’adapte
Face au coup de pression des régulateurs et des acteurs blockchain, la criminalité liée aux cryptos s’adapte. Les réseaux de blanchiment comme Huione Guarantee développent leurs propres solutions pour échapper à la vigilance de Tether & co.
Ainsi, afin de contourner les gels de plus en plus fréquents de l’USDT, cette plateforme du Darkweb a lancé son propre stablecoin en septembre dernier. Une parade qui complique le travail des enquêteurs et oblige l’écosystème à redoubler de créativité pour endiguer les flux illégaux.
Au final, ce coup de filet historique en Espagne marque une victoire majeure dans la lutte contre le blanchiment crypto. Mais il rappelle aussi l’ampleur du défi à relever pour assainir un écosystème encore vulnérable aux dérives mafieuses. Un combat de longue haleine qui se jouera autant sur le terrain technologique que réglementaire.