L’année 2024 marque un nouveau cap alarmant dans l’univers des cryptomonnaies. Alors que 2023 avait vu une accalmie bienvenue, les douze derniers mois ont été le théâtre d’une vague sans précédent de piratages et d’activités malveillantes ciblant l’écosystème crypto. Un constat glaçant qui ressort du dernier rapport de Chainalysis, référence en matière d’analyse blockchain.
303 hacks majeurs, 2,2 milliards de dollars envolés : l’annus horribilis crypto
Les chiffres donnent le vertige. En 2024, pas moins de 303 incidents de hacking significatifs ont été recensés par Chainalysis, un record absolu. C’est 21 de plus qu’en 2023, qui était déjà une année noire. Les pertes financières liées à ces attaques ont également bondi, passant de 1,8 milliard de dollars l’an dernier à 2,2 milliards en 2024. Un montant colossal, même s’il reste inférieur aux records de 2021 et 2022, à respectivement 3,3 et 3,7 milliards de dollars.
Autre fait marquant souligné par le rapport : la baisse brutale des piratages après le mois de juillet. Une accalmie possiblement liée au rapprochement stratégique entre la Corée du Nord et la Russie, qui aurait réorienté une partie des ressources des hackers nord-coréens vers d’autres activités illicites.
DeFi et CeFi : le grand basculement des cibles
2024 marque également un tournant dans les cibles privilégiées des pirates. Jusqu’ici, les protocoles de finance décentralisée (DeFi) étaient leur terrain de jeu favori. Mais cette année, les plateformes centralisées (CeFi) sont devenues les victimes numéro un. Un changement de stratégie logique selon les experts, l’architecture centralisée de ces services reposant souvent sur des clés privées uniques, qui ouvrent la porte à des butins faramineux en cas de compromission.
La gestion des clés privées est ainsi devenue le maillon faible exploité par les hackers, via des attaques de phishing sophistiquées ou des failles dans les protocoles de sécurité. Un constat sans appel sur les limites de la centralisation.
La Corée du Nord, reine incontestée des hacks crypto
Sans surprise, la Corée du Nord truste le haut du classement des pays à l’origine des piratages crypto. Le groupe Lazarus, affilié au régime de Pyongyang, aurait à lui seul dérobé 1,34 milliard de dollars en 2024, soit une hausse vertigineuse de 102% en un an. Des fonds qui, selon les autorités américaines, serviraient à financer le programme nucléaire et balistique nord-coréen.
Les hackers de Lazarus rivalisent d’ingéniosité pour infiltrer l’écosystème crypto, de l’utilisation de jeux NFT vérolés à l’insertion de failles dans le code de projets d’envergure, en passant par des techniques d’ingénierie sociale toujours plus élaborées. Malgré quelques coups d’éclat des forces de l’ordre et des acteurs crypto pour récupérer une partie des fonds, l’essentiel du butin reste entre les mains des pirates.
Arnaques romantiques : l’autre fléau crypto en plein essor
Outre les hacks de grande ampleur, les utilisateurs de cryptomonnaies sont aussi la cible d’arnaques de plus en plus sophistiquées. C’est le cas notamment des escroqueries dites “à la romance” ou “pig butchering”, qui ont explosé en 2024. Le principe est aussi pervers que lucratif : les arnaqueurs nouent une relation romantique en ligne avec leurs victimes, souvent vulnérables, avant de les inciter à investir sur de fausses plateformes avec la promesse de gains rapides. La confiance installée, il ne reste plus qu’à les dépouiller de toutes leurs économies.
Fort heureusement, ces arnaques laissent souvent plus de traces que les hacks, ce qui a permis aux autorités américaines de procéder à plusieurs arrestations retentissantes en 2024. Mais la vigilance reste de mise pour les investisseurs crypto.
Renforcer la sécurité et la réglementation : un impératif pour 2025
Face à cette recrudescence des activités malveillantes, l’écosystème crypto se doit de réagir. Chainalysis a identifié plusieurs pistes d’amélioration, à commencer par une sécurisation accrue des clés privées, via des solutions de stockage hors ligne (cold storage) ou de gestion multisignature. Les plateformes sont aussi appelées à renforcer leur surveillance des transactions suspectes en temps réel, et à collaborer plus étroitement avec les autorités et les experts en cybersécurité.
Mais la réponse ne peut pas être que technique. L’absence de réglementation claire et harmonisée à l’échelle mondiale est un frein majeur à la lutte contre ces attaques, en particulier dans les zones grises où évoluent de nombreux acteurs crypto. Un défi de taille pour les régulateurs en 2025, alors que le Web3 continue son irrésistible expansion.
Une chose est sûre : face à des hackers toujours plus inventifs et déterminés, l’industrie crypto va devoir redoubler d’efforts pour sécuriser ses actifs et regagner la confiance des investisseurs échaudés. Un prérequis indispensable pour espérer concrétiser les promesses d’un écosystème décentralisé, transparent et résilient. Le chemin est encore long, mais la prise de conscience est là. Vivement 2025 !