Aussi régulier qu’un métronome, aussi prévisible que le lever du soleil. Dès qu’il est question de Bitcoin et des cryptomonnaies décentralisées à la Banque des Règlements Internationaux (BRI), un seul mot revient tel un mantra obsessionnel dans la bouche de ces banquiers supranationaux : “risque(s)”. Que ce soit aujourd’hui, fin juin, ou même déjà en février 2023, le disque est invariablement le même. La rengaine lancinante des risques des actifs risqués que seraient les risquées cryptomonnaies.
158 occurrences du mot “risque” en 31 pages, la BRI bat son record
Ce 28 août 2024, tel un oracle de malheur, la BRI basée à Bâle en Suisse a publié son énième rapport titré sans ambiguïté : “Nouveaux risques, mesures d’atténuation et incertitudes liés aux technologies des registres distribués sans autorisation (permissionless)”. La tonalité est donnée d’emblée.
En seulement 31 pages, le terme “risk(s)” apparaît la bagatelle de 158 fois, soit plus de 5 occurrences par page en moyenne ! Le résumé introductif donne le “la” en alignant pas moins de 5 “risques” en quelques lignes à peine :
Les banques qui effectuent des transactions sur des blockchains sans autorisation, ou des technologies similaires de registres distribués, sont confrontées à des risques liés aux opérations et à la sécurité, à la gouvernance, au juridique, à la conformité – y compris le blanchiment d’argent/le financement du terrorisme – et à la finalité du règlement. Certains risques découlent de la dépendance des blockchains à l’égard de tiers inconnus, ce qui complique la tâche des banques en matière de diligence raisonnable et de surveillance. Ces risques nécessitent de nouvelles stratégies de gestion des risques et de nouvelles mesures de protection. Les pratiques actuelles visant à atténuer ces risques en sont encore à divers stades de développement et n’ont pas été testées en situation de stress.
Rapport de la BRI du 28 août 2024
Bitcoin et Ethereum dans le viseur de la banque des banques
La cible est claire, la BRI cherche à dissuader les banques d’utiliser des blockchains publiques comme celles de Bitcoin et Ethereum. Ces registres distribués “sans autorisation (centralisée)” échappant au contrôle d’acteurs uniques sur lesquels des pressions étatiques ou bancaires peuvent être exercées, voilà l’ennemi à abattre.
D’ailleurs, aussi surprenant que cela puisse paraître dans un rapport dédié aux risques des registres distribués largement popularisés par Bitcoin, le nom de la cryptomonnaie originelle n’est mentionné que… 2 petites fois ! Et encore, seulement dans des notes de bas de page, jamais dans le corps du texte.
La conclusion sans appel de la BRI
Quant à la conclusion lapidaire de ce rapport de la BRI, elle réussit l’exploit de marteler 10 fois supplémentaires le mot “risque” :
Les blockchains sans autorisation créent des risques qui relèvent des taxonomies de risque existantes – principalement le risque opérationnel et, dans une moindre mesure, le risque de liquidité et le risque de marché. Les banques ont l’habitude de gérer ces types de risques, mais les blockchains sans autorisation présentent de nouveaux défis qui peuvent nécessiter des méthodes nouvelles ou supplémentaires pour gérer les risques. Les pratiques visant à atténuer ces risques en sont à divers stades de développement et n’ont généralement pas été testées en situation de stress. Bien que les solutions technologiques à ces risques ne soient pas encore mûres, des développements rapides peuvent générer de nouvelles solutions (et de nouveaux risques) qui pourraient bénéficier d’un examen plus approfondi.
Rapport de la BRI du 28 août 2024
Le message martelé par les banquiers de la BRI est on ne peut plus limpide. Après tant de répétitions, difficile d’invoquer un quelconque doute ou une incompréhension.
Psychopathe ou épris de liberté ?
Si malgré tout vous demeurez séduit par les promesses d’émancipation des cryptomonnaies décentralisées comme Bitcoin, par leur résistance à la censure et leur potentiel de liberté financière, c’est que vous êtes probablement un “psychopathe” aux yeux de certains. Un dangereux iconoclaste épris d’hérésies numériques, réfractaire au conformisme bien-pensant prôné par la banque des banques.
Mais rassurez-vous, vous n’êtes pas seul. Ils sont de plus en plus nombreux, ces “psychopathes” de la cryptosphère, à vouloir s’extirper de la doxa monétaire imposée. Gageons que les anathèmes et autres rapports alarmistes des gardiens de l’orthodoxie financière ne suffiront pas à endiguer leur détermination. Car après tout, comme le disait si justement Goethe :
Alors, banquiers de la BRI, continuez donc de crier au loup et d’agiter éperdument vos chiffons rouges. Vos mises en garde réitérées et vos anathèmes de moins en moins voilés ne font finalement que trahir votre fébrilité face à l’inexorable essor de ces actifs décentralisés qui vous échappent. Votre imposant “Rapport sur les risques” pourrait bien in fine se révéler n’être qu’un tigre de papier.