L’affaire Tornado Cash continue de faire grand bruit au sein de la communauté des cryptomonnaies. Dernier rebondissement en date : la juge américaine Katherine Polk Failla vient de rejeter la demande de non-lieu déposée par Roman Storm, l’un des cofondateurs du célèbre protocole d’anonymisation des transactions. Une décision lourde de conséquences qui pourrait bien faire jurisprudence pour l’avenir de la crypto.

Tornado Cash, un mixeur au cœur de la tourmente

Pour bien comprendre les enjeux de ce procès retentissant, il faut revenir sur le fonctionnement même de Tornado Cash. Ce protocole open source, lancé en 2019 sur la blockchain Ethereum, permet de brouiller l’origine et la destination des fonds lors d’une transaction. Un système ingénieux qui garantit un anonymat quasi-total à ses utilisateurs.

Mais voilà, Tornado Cash a rapidement été pointé du doigt par les autorités pour son rôle central dans de nombreuses affaires de blanchiment d’argent et d’évasion fiscale. Le protocole aurait ainsi permis de “mixer” pour plusieurs milliards de dollars de fonds d’origine illicite en à peine quelques années, échappant à tout contrôle.

Le sulfureux groupe Lazarus dans le viseur

Parmi les utilisateurs les plus assidus de Tornado Cash, on retrouve notamment le tristement célèbre groupe de hackers nord-coréens Lazarus. Ces pirates informatiques, soutenus par le régime de Pyongyang, sont suspectés d’avoir détourné des centaines de millions de dollars en cryptomonnaies via le protocole. De quoi alerter les services secrets américains et précipiter la chute de Tornado Cash.

L’arrestation choc des cofondateurs

En août 2023, le couperet tombe. Les autorités américaines procèdent à l’arrestation des deux principaux développeurs de Tornado Cash : Roman Storm et Roman Semenov. Une véritable bombe dans l’écosystème crypto. Les deux hommes sont accusés d’avoir facilité le blanchiment de plusieurs milliards de dollars via leur protocole.

Le code est-il un discours protégé par le Premier Amendement ? C’est toute la question au cœur de ce procès.

Jake Chervinsky, Variant Fund

Pour leur défense, Storm et Semenov invoquent le Premier Amendement de la Constitution américaine, arguant que “le code est un discours” et qu’ils ne peuvent être tenus responsables de l’utilisation malveillante faite de leur logiciel open source. Mais la juge Failla ne l’entend pas de cette oreille.

Un procès historique qui pourrait faire jurisprudence

En rejetant la demande de non-lieu de Roman Storm, la magistrate envoie un message clair : pour elle, la “capacité fonctionnelle” d’un code ne peut être protégée par la liberté d’expression. Une analyse juridique qui pourrait avoir de lourdes répercussions sur l’ensemble de l’industrie, bien au-delà du seul cas Tornado Cash.

Les enjeux du procès Tornado Cash en bref :

  • La responsabilité des développeurs de protocoles pour l’utilisation illicite qui est faite de leur code
  • Le statut légal du code informatique au regard du Premier Amendement sur la liberté d’expression
  • L’avenir de l’anonymat des transactions et de la confidentialité sur les blockchains publiques

Si Roman Storm venait à être condamné, cela créerait en effet un précédent dangereux pour tous les développeurs de l’écosystème. À l’avenir, concevoir un protocole garantissant l’anonymat comme Tornado Cash pourrait être assimilé à de la complicité de blanchiment d’argent. De quoi refroidir plus d’un codeur et freiner l’innovation dans ce domaine.

Mais pour de nombreux défenseurs des libertés individuelles, ce procès représente surtout une attaque en règle contre le droit à la vie privée sur les blockchains publiques. Pour eux, pouvoir effectuer des transactions de façon confidentielle est un droit fondamental et Tornado Cash n’a fait que fournir un outil pour l’exercer.

Tornado Cash toujours en fonction malgré les poursuites

En attendant l’issue du procès, prévu pour durer une à deux semaines, Tornado Cash reste pleinement opérationnel et continue d’être utilisé par de nombreux utilisateurs à leurs risques et périls. Ironie du sort, le récent pirate de la plateforme d’échanges WazirX aurait justement eu recours au protocole pour blanchir son butin de plus de 6 millions de dollars.

Une preuve supplémentaire que malgré les tentatives de régulation, il est extrêmement difficile d’empêcher totalement l’utilisation des outils d’anonymisation sur des réseaux ouverts et décentralisés comme Ethereum. Le débat est loin d’être clos et tout le monde attend désormais avec impatience le verdict de ce procès au long cours.

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