Roger Ver fait partie de ces personnages qui auront marqué à jamais l’histoire du Bitcoin et des cryptomonnaies. Surnommé « Bitcoin Jesus » pour avoir été un des premiers évangélistes de la première crypto, ce libertarien convaincu aura consacré une partie de sa vie et de sa fortune à promouvoir l’adoption du Bitcoin. Mais le personnage est loin de faire l’unanimité au sein de la communauté, notamment depuis son rôle controversé dans la création du Bitcoin Cash en 2017. Aujourd’hui, c’est un autre aspect sulfureux de sa personnalité qui le rattrape : le fisc américain qu’il avait fui il y a 10 ans en renonçant à sa nationalité. Arrêté en Espagne en avril dernier sur demande des autorités américaines, Roger Ver vient d’être libéré sous caution en attendant son extradition.

Les déboires de Roger Ver avec l’IRS, une vieille histoire

L’histoire entre Roger Ver et le fisc américain ne date pas d’hier. Déjà en 2002, bien avant le Bitcoin, il avait été condamné à 10 mois de prison pour avoir vendu des explosifs sur eBay sans licence. Une première confrontation avec le système légal américain qui ne fera que renforcer ses convictions libertariennes. Lorsqu’il découvre le Bitcoin en 2011, il y voit un outil révolutionnaire pour s’émanciper de la tutelle étatique et surtout du dollar. Il investit alors massivement dans la cryptomonnaie et dans de nombreuses startups de l’écosystème.

Mais en 2014, alors que le cours du Bitcoin s’envole, Roger Ver décide de prendre le large. Il s’expatrie à Saint-Kitts-et-Nevis dans les Caraïbes et renonce officiellement à sa nationalité américaine. Un choix fort mais qui ne sera pas sans conséquences. Car l’Internal Revenue Service (IRS), le fisc américain, estime que Roger Ver lui doit encore 48 millions de dollars d’impôts sur ses plus-values en cryptomonnaies, réalisées après son départ du pays. Une somme colossale que l’intéressé conteste fermement, mais qui va lui valoir d’être dans le collimateur de l’oncle Sam pendant de longues années.

2024 : l’étau se resserre sur « Bitcoin Jesus »

Après une décennie de traque, la justice américaine semble aujourd’hui proche d’atteindre son objectif. Le 30 avril dernier, Roger Ver a été arrêté en Espagne sur demande du Département de la Justice US. L’acte d’accusation est accablant : fraude fiscale, évasion fiscale, fausses déclarations… L’homme risque théoriquement jusqu’à 20 ans de prison fédérale. Mais il entend bien se battre et a déposé une demande de libération sous caution en attendant la procédure d’extradition.

Une demande qui vient d’être acceptée le 5 juin par la justice espagnole, moyennant le versement de 163 000 dollars de caution. Roger Ver va donc pouvoir quitter sa cellule, mais sous strictes conditions : dépôt de son passeport, interdiction de quitter le territoire espagnol et obligation de se présenter au tribunal tous les deux jours. Des mesures qui visent à s’assurer qu’il ne prendra pas la fuite en attendant son probable transfert vers les États-Unis.

Ne vous attendez pas à ce que les mauvaises personnes fassent de bonnes choses.

Roger Ver, dernier message avant son arrestation

Entre lumières et parts d’ombre, la destinée paradoxale d’une figure mythique

L’histoire de Roger Ver est à l’image du personnage : complexe et paradoxale. Incontestablement visionnaire lorsqu’il pressent dès 2011 le formidable potentiel perturbateur du Bitcoin, il aura consacré une énergie et des moyens considérables pour propager la bonne parole cryptographique à travers le monde. Conférences, interviews, investissements… « Bitcoin Jesus » aura été un évangéliste infatigable de la première cryptomonnaie, contribuant à la faire connaître du grand public.

Mais Roger Ver c’est aussi un libertarien radical, profondément méfiant envers les institutions étatiques et attaché à une vision originelle du Bitcoin comme alternative décentralisée au système monétaire. Une position « puriste » et jusqu’au-boutiste qui l’amènera à s’opposer violemment à une partie de la communauté sur la question de l’évolution du protocole, jusqu’à faire sécession en créant le Bitcoin Cash en 2017. Un schisme qui lui vaudra de solides inimitiés parmi les anciens soutiens.

Les 3 vies de Roger Ver en une timeline :

  • 2011 : découverte du Bitcoin, début de l’évangélisation
  • 2014 : départ des USA, renoncement à la nationalité américaine
  • 2017 : rupture avec le Bitcoin, création du Bitcoin Cash

Enfin, le dernier acte de cette trajectoire hors norme prend aujourd’hui la forme d’une confrontation frontale avec la puissance publique américaine. Rattrapé par un passif fiscal vieux de 10 ans, Roger Ver pensait sans doute que sa nouvelle nationalité et son exil caribéen le préserverait de ses créanciers étatiques. C’était mal connaître la ténacité de l’IRS et la force du bras armé judiciaire de Washington. Même en tournant le dos à l’Oncle Sam, on ne lui échappe jamais vraiment.

Alors que le dénouement judiciaire de cette affaire semble proche, le destin de « Bitcoin Jesus » apparaît aujourd’hui plus incertain que jamais. Figure tutélaire des premières années héroïques du Bitcoin, chantre de la liberté individuelle et pourfendeur de l’arbitraire étatique, Roger Ver se retrouve rattrapé par ses propres contradictions. Celles d’un homme qui aura poussé sa logique libertarienne jusqu’à la rupture, quitte à se mettre hors-la-loi de la nation qui l’a vu naître. L’histoire retiendra sans doute qu’il aura été un des principaux artisans de l’incroyable épopée du Bitcoin et des cryptomonnaies. Mais elle ne pourra pas ignorer non plus les parts d’ombre du personnage et la fin paradoxale d’un prophète renié par une partie de son église. Dans la grande saga crypto, la parabole de Roger Ver restera comme un des récits les plus fascinants.

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