Alors que la campagne pour l’élection présidentielle américaine de 2024 bat son plein, un sujet inattendu s’est hissé au cœur des débats : les cryptomonnaies. Entre partisans d’une régulation favorable et opposants méfiants, l’avenir de ce secteur en plein essor pourrait se jouer dans les urnes le 5 novembre prochain. Petit tour d’horizon des forces en présence sur l’échiquier politique américain.
Une première : la crypto au cœur des enjeux électoraux
Pour la première fois dans l’histoire des élections américaines, les cryptomonnaies occupent une place de choix dans les programmes et les discours des candidats. Loin d’être anecdotique, cette irruption témoigne de l’importance croissante de ce marché qui pèse aujourd’hui plus de 1000 milliards de dollars. Avec près de 70 millions d’Américains détenteurs de cryptomonnaies, soit environ 20% de la population, les électeurs sont de plus en plus attentifs aux positions des prétendants à la Maison Blanche sur le sujet.
D’un côté, on retrouve les chantres d’une régulation souple et bienveillante, voyant dans les cryptos et la blockchain des technologies d’avenir porteuses d’innovation et de croissance. De l’autre, les partisans d’un encadrement strict, voire d’une interdiction pure et simple, pointant du doigt les risques de déstabilisation financière et les dérives criminelles liées à ces actifs décentralisés. Tour d’horizon des principaux acteurs de ce clivage.
Les alliés de la crypto au Capitole
Parmi les plus fervents défenseurs des cryptomonnaies, on retrouve des figures politiques de premier plan :
- Cynthia Lummis, sénatrice républicaine du Wyoming, milite pour faire des États-Unis un eldorado des cryptos. Elle a notamment déposé un projet de loi visionnaire visant à créer une “réserve stratégique de Bitcoin”.
- Kirsten Gillibrand, sénatrice démocrate de New York, s’est alliée à Lummis pour proposer un cadre réglementaire favorable aux stablecoins et à l’innovation blockchain.
- Tom Emmer, représentant républicain du Minnesota, préside le caucus blockchain du Congrès et s’oppose à toute réglementation jugée trop restrictive.
- Ritchie Torres, représentant démocrate de New York, voit dans le bitcoin un outil d’émancipation pour les communautés défavorisées.
Ces élus partagent la conviction que les États-Unis doivent saisir l’opportunité des cryptomonnaies pour renforcer leur leadership technologique et financier. Ils plaident pour une approche réglementaire mesurée, permettant à l’écosystème blockchain de se développer tout en luttant contre ses dérives.
Les pourfendeurs de la crypto
À l’opposé du spectre, plusieurs figures politiques de premier plan affichent une grande méfiance, voire une franche hostilité, à l’égard des cryptomonnaies :
- Elizabeth Warren, sénatrice démocrate du Massachusetts, est l’une des voix les plus critiques. Elle accuse les cryptos de n’être qu’un outil de spéculation au service du crime organisé.
- Brad Sherman, représentant démocrate de Californie, va jusqu’à appeler à une interdiction pure et simple du bitcoin et des cryptomonnaies.
- Sherrod Brown, sénateur démocrate de l’Ohio et président de la commission bancaire du Sénat, met en garde contre l’instabilité financière induite par les cryptos.
- Maxine Waters, représentante démocrate de Californie, souhaite des garde-fous stricts pour protéger les consommateurs des arnaques liées aux cryptos.
Pour ces détracteurs, les cryptomonnaies représentent avant tout une menace pour la stabilité économique et un terreau fertile pour les activités illicites. Ils prônent un contrôle législatif renforcé et n’hésitent pas à agiter le spectre d’une interdiction totale en cas de dérapage.
Des revirements spectaculaires
Certains acteurs politiques ont opéré des virages à 180 degrés sur la question des cryptomonnaies, à l’image de Donald Trump. Longtemps sceptique, l’ancien président a récemment promis de faire des États-Unis la “capitale mondiale de la crypto” en cas de victoire en 2024. Un revirement spectaculaire qui témoigne de l’importance croissante de cet enjeu électoral.
Du côté démocrate, Kamala Harris, actuelle vice-présidente et candidate pressentie, affiche une position plus mesurée. Tout en reconnaissant le potentiel de la blockchain, elle appelle à une régulation équilibrée pour prévenir les dérives. Une ligne médiane qui pourrait faire consensus au sein d’un parti démocrate divisé sur la question.
L’avenir des cryptos dans les urnes
Au-delà des engagements de campagne, l’élection du 5 novembre prochain aura des répercussions majeures et durables sur l’écosystème crypto. Selon les résultats des urnes, plusieurs scénarios sont envisageables :
- Une victoire démocrate pourrait déboucher sur une régulation accrue mais bienveillante, visant à encadrer le secteur sans l’étouffer. Une opportunité pour les acteurs les plus sérieux de gagner en légitimité.
- Un succès républicain, surtout en cas de retour de Donald Trump à la Maison Blanche, ouvrirait la voie à une politique pro-crypto assumée. Les États-Unis pourraient devenir une terre d’accueil pour les entreprises blockchain du monde entier.
- Un Congrès divisé, avec une majorité démocrate au Sénat et républicaine à la Chambre des représentants, déboucherait probablement sur un statu quo législatif. De quoi laisser le champ libre à des agences comme la SEC pour durcir la répression réglementaire.
Une chose est sûre : l’élection présidentielle américaine de 2024 sera un tournant décisif pour l’avenir des cryptomonnaies. Entre l’émergence d’une “Crypto Valley” outre-Atlantique et le spectre d’une interdiction pure et simple, tous les scénarios sont sur la table. Les géants de la blockchain, comme Coinbase ou Binance, l’ont bien compris. Ils multiplient les opérations de lobbying à Washington pour faire pencher la balance en leur faveur.
Alors que la campagne entre dans sa dernière ligne droite, une chose est sûre : la crypto sera l’un des grands enjeux du scrutin à venir, au même titre que l’économie, la sécurité ou l’environnement. Les électeurs américains, dont un sur cinq possède des cryptomonnaies, pourraient bien faire la différence. Réponse dans les urnes le 5 novembre.