La décision d’approuver la vente des 69 370 Bitcoins saisis lors du démantèlement de Silk Road en 2013 a provoqué une véritable tempête au sein de la communauté crypto. Cette affaire, qui traîne depuis des années dans les méandres judiciaires, vient de connaître un rebondissement majeur avec le feu vert donné par le tribunal du district nord de la Californie. Mais alors que certains y voient une victoire de la justice, d’autres s’inquiètent des conséquences potentiellement désastreuses d’une telle vente sur le marché des cryptomonnaies.
Un feuilleton judiciaire qui touche à sa fin ?
Tout commence le 30 décembre 2024, lorsque le juge Richard Seeborg rejette une motion visant à bloquer la saisie des Bitcoins liés à Silk Road. Cette décision ouvre la voie au département de la Justice pour liquider ce trésor numérique, estimé à plus de 6,5 milliards de dollars au cours actuel. Mais le chemin est encore long avant une éventuelle vente, car des recours et des procédures administratives pourraient encore retarder le processus.
Pour rappel, le site de vente illégale Silk Road avait été fermé par le FBI en 2013. Ce n’est qu’en 2020 que l’individu détenant les plus de 69 000 Bitcoins associés au site a accepté de les remettre au gouvernement américain. Parmi les entités qui se sont battues pour récupérer ces fonds, on trouve notamment la société Battle Born Investments. Mais en octobre 2024, la Cour Suprême a refusé d’examiner l’affaire, pavant ainsi la voie à l’approbation de la vente.
Un enjeu politique brûlant
Au-delà de l’aspect purement financier, cette affaire revêt une dimension politique cruciale. Lors de la conférence Bitcoin de Nashville l’an dernier, le président élu Donald Trump avait en effet promis que les États-Unis ne vendraient jamais leurs Bitcoins. Il avait même évoqué la création d’une réserve stratégique de Bitcoins pour faire de l’Amérique la capitale mondiale des cryptomonnaies.
La vente potentielle des Bitcoins saisis va donc à l’encontre des intentions affichées par la future administration Trump. Certains y voient un acte délibéré de l’administration sortante pour saper la politique de Trump, à l’image de la grâce accordée par Joe Biden à son fils Hunter après la victoire de Trump aux élections. D’autres estiment que le gouvernement actuel ne considère pas le Bitcoin comme un actif de valeur et cherche à s’en débarrasser avant le début d’un marché baissier.
La communauté crypto s’enflamme
Sans surprise, l’annonce de l’approbation de la vente a suscité de vives réactions sur les réseaux sociaux, en particulier sur Crypto X. De nombreux entrepreneurs et influenceurs du secteur ont fustigé cette décision, affirmant que si le ministère de la Justice vendait ces Bitcoins, Trump en achèterait encore plus, voire le double.
Mais au-delà des invectives, certains apportent une analyse plus nuancée. C’est le cas de David Bailey, PDG du Bitcoin Magazine, qui estime que la vente de ces Bitcoins destinés à faire partie de la réserve stratégique serait perçue comme un “doigt d’honneur aux électeurs”. Il suggère que le ministère de la Justice cherche avant tout à renflouer ses caisses avant l’arrivée de la nouvelle administration.
De son côté, Caitlin Long, PDG de Custodia Bank et critique acharnée de l’Operation Choke Point 2.0, va plus loin en soulevant la question d’un possible délit d’initié. Elle imagine un scénario où des membres du gouvernement rachèteraient des Bitcoins pour leur compte personnel après avoir fait chuter les cours en vendant massivement pendant un creux de marché. Une manipulation de marché en bonne et due forme, mais “légale si c’est le gouvernement qui le fait”, ironise-t-elle.
John E. Deaton, entrepreneur et ancien candidat au Sénat, abonde dans ce sens. Il pense que cette décision ne fera qu’accélérer la création de la réserve stratégique de Bitcoins, car Trump et David Sacks y verront un véritable sabotage.
Les 69 370 Bitcoins en question ne représentent qu’une goutte d’eau
- La vente potentielle ne représente qu’une infime partie des Bitcoins que Trump ou la sénatrice Lummis veulent voir détenus par les USA.
- Le parcours judiciaire de cette affaire est encore long et semé d’embûches avant une éventuelle vente effective.
- L’impact réel sur les cours du Bitcoin devrait être limité, au-delà de la réaction épidermique des marchés.
En définitive, si l’approbation de la vente des Bitcoins saisis sur Silk Road fait grand bruit, son impact réel sur le marché et la politique crypto des États-Unis reste à déterminer. Une chose est sûre, cette affaire illustre parfaitement les enjeux colossaux, tant financiers que politiques, qui entourent désormais le Bitcoin et les cryptomonnaies. Dans ce bras de fer entre l’ancien et le nouveau monde, il est encore difficile de prédire qui aura le dernier mot. Mais une chose est certaine, la communauté crypto suivra avec attention les prochains épisodes de ce feuilleton judiciaire et politique hors norme.