Imaginez un instant que vous soyez accusé à tort d’un délit par les autorités. On vous force à mettre fin à vos activités, votre réputation est entachée, votre entreprise est lourdement impactée. Puis un beau jour, sans explications, on vous annonce que les poursuites sont abandonnées et que vous n’avez en fait rien fait de répréhensible. C’est un peu ce qui vient d’arriver à Paxos avec son stablecoin BUSD.
La SEC fait machine arrière sur le statut du BUSD
En février 2023, la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine avait lancé une enquête sur la société Paxos, émettrice du stablecoin BUSD en partenariat avec Binance. Selon le gendarme boursier, le BUSD constituait une offre de titres non enregistrés. En conséquence, les autorités new-yorkaises avaient ordonné à Paxos de cesser l’émission de nouveaux BUSD.
Mais coup de théâtre cette semaine : la SEC a finalement clos son investigation, admettant à demi-mot s’être trompée sur la nature du BUSD. Dans une lettre adressée à Paxos, le régulateur indique ne pas avoir l’intention de recommander une action coercitive à l’encontre de la société, faute d’éléments.
Le BUSD décimé par l’intervention de la SEC
Si cette annonce sonne comme une victoire pour Paxos et l’industrie des cryptomonnaies en général, le mal est déjà fait pour le stablecoin BUSD. Suite à l’action de la SEC début 2023, Paxos avait été contraint de cesser l’émission de nouveaux jetons et de placer le BUSD en mode “remboursement uniquement” jusqu’à au moins février 2024.
Résultat, le stablecoin qui culminait à plus de 23 milliards de dollars de capitalisation n’affiche plus qu’une maigre offre en circulation de 70 millions de dollars aujourd’hui. Un effondrement spectaculaire causé par l’intervention brutale et finalement infondée du régulateur.
La SEC doit-elle rendre des comptes ?
Au vu de ce retournement de situation, nombreux sont ceux dans la communauté crypto à s’interroger sur la responsabilité de la SEC. Son approche agressive dans le cadre de “l’Opération Choke Point 2.0” ciblant les acteurs de l’écosystème a causé des dégâts considérables, alors même que le bien-fondé des accusations semble plus que discutable.
Les dommages causés par l’action de la SEC :
- Effondrement du stablecoin BUSD passant de 23 milliards à 70 millions de dollars de capitalisation
- Perte de confiance et de parts de marché pour Paxos et Binance sur ce produit
- Incertitudes réglementaires pesant sur l’industrie des stablecoins et des cryptos en général
Mais malgré l’abandon des charges, il semble peu probable que le régulateur soit tenu de rendre des comptes pour son intervention aux conséquences désastreuses. Comme le souligne un observateur sur Twitter :
Un pas vers la clarification du statut des stablecoins
Au-delà du cas BUSD, cette affaire apporte néanmoins une clarification bienvenue sur le statut réglementaire des stablecoins. En renonçant à poursuivre Paxos, la SEC reconnaît de fait que ces jetons adossés à des devises ne constituent pas des titres financiers au regard de la loi américaine.
Une position qui fait écho aux propos récents de Rostin Behnam, président de la CFTC, selon qui 70 à 80% des cryptomonnaies – stablecoins inclus – ne sont pas des titres. Cela devrait faciliter l’élaboration d’un cadre légal adapté pour ces actifs numériques dans un futur proche.
Malgré une issue favorable, l’épisode BUSD laisse un goût amer et illustre les défis persistants en matière de régulation des cryptomonnaies. Si la nécessité d’un encadrement fait consensus, la méthode employée interroge. Espérons que les régulateurs sauront tirer les leçons de cet incident pour adopter une approche plus mesurée et constructive à l’avenir, dans l’intérêt de tous.