Imaginez-vous réveillé à 4h42 du matin par une alerte : plusieurs dizaines de millions de dollars viennent de quitter vos wallets d’exchange sans votre accord. C’est exactement ce qui est arrivé à Upbit, le leader coréen, dans la nuit du 26 au 27 novembre 2025. Et pourtant, quelques heures plus tard, le cours de Solana progressait tranquillement. Bienvenue dans la nouvelle maturité du marché crypto.
Un hold-up numérique de 36 millions en pleine nuit coréenne
Tout commence par une série de transactions étranges détectées sur le réseau Solana. Des montants colossaux quittent les hot wallets d’Upbit vers une adresse inconnue. En quelques minutes, l’équivalent de 54 milliards de wons coréens (environ 36,8 millions de dollars) disparaît. L’attaque est chirurgicale : elle vise spécifiquement les réserves Solana de la plateforme.
Ce qui rend l’affaire particulièrement spectaculaire, c’est la diversité des actifs touchés. On ne parle pas seulement de SOL natif, mais d’une véritable razzia à travers tout l’écosystème :
- USDC (stablecoin)
- BONK (meme coin roi sur Solana)
- JUP (Jupiter, le plus gros DEX)
- RAY (Raydium)
- RENDER (token de rendu décentralisé)
- ORCA, PYTH, et des dizaines d’autres projets phares
En clair, les hackers ont littéralement vidé la vitrine Solana d’Upbit.
« Nous confirmons qu’un incident de sécurité a eu lieu sur certains de nos hot wallets Solana. Tous les fonds clients seront intégralement remboursés via nos réserves. »Communiqué officiel Upbit – 27 novembre 2025
La réaction éclair qui a limité les dégâts
Moins de deux heures après les premières alertes, Upbit suspend tous les dépôts et retraits Solana. Les équipes transfèrent en urgence les fonds restants vers des cold wallets hors ligne. Résultat : l’hémorragie est stoppée net.
Mieux encore, environ 8,18 millions de dollars en tokens LAYER sont gelés grâce à la coopération avec les équipes du projet. Les autres protocoles touchés (Jupiter, Raydium, etc.) travaillent également au blocage des fonds volés sur leurs plateformes respectives.
Ce qu’il faut retenir de la réponse d’Upbit :
- Suspension immédiate du réseau Solana
- Transfert massif vers cold storage
- Communication transparente dès 6h du matin
- Engagement ferme : remboursement total des clients
- Coopération active avec les projets et autorités
Pourquoi Solana n’a pas plongé (et a même monté)
Dans le passé, un hack de cette ampleur aurait provoqué une chute brutale du token concerné. Souvenez-vous du crash de LUNA, ou même des -20 % de SOL lors de certains incidents passés. Cette fois ? Le cours a gagné près de 4 % dans les 12 heures suivant l’annonce.
Plusieurs facteurs expliquent cette résilience inédite.
Premièrement, le problème est clairement identifié comme venant d’un hot wallet d’exchange, pas du protocole Solana lui-même. Les investisseurs expérimentés savent faire la différence entre une faille réseau et une erreur de garde centralisée.
Deuxièmement, la promesse de remboursement intégral change tout. Quand Binance avait été hacké en 2019, le #SAFU Fund avait sauvé la situation. Upbit applique exactement la même stratégie, et le marché le sait.
Troisièmement, le timing. Nous sommes en pleine saison haussière post-élection américaine, avec des ETF Solana en approche et un narratif extrêmement fort autour du réseau. 36 millions, dans un marché qui brasse des milliards par jour, c’est devenu… presque anecdotique.
Upbit : un géant coréen déjà échaudé par le passé
Ce n’est pas la première fois qu’Upbit fait la une pour les mauvaises raisons. Le 27 novembre 2019 – exactement six ans jour pour jour – l’exchange avait perdu 58 000 ETH (environ 49 millions de dollars à l’époque) dans un hack similaire.
Depuis, la plateforme a multiplié les mesures de sécurité : assurances, fonds de garantie, audits réguliers. Le fait que les clients soient aujourd’hui protégés à 100 % n’est pas un hasard, c’est le fruit d’une douloureuse expérience.
Les leçons brutales pour tous les utilisateurs
Cet incident, aussi bien géré soit-il, rappelle une vérité que beaucoup préfèrent ignorer : laisser ses cryptos sur un exchange, c’est accepter un risque de contrepartie.
Upbit rembourse ? Parfait. Mais tous les exchanges n’ont pas 36 millions en réserve. Et tous les pays n’ont pas la même rigueur réglementaire que la Corée du Sud.
- Un hot wallet = clé privée détenue par l’exchange
- Un cold wallet exchange = toujours une forme de confiance
- Un wallet personnel (Ledger, Phantom auto-custodial) = pas de contrepartie
Chaque hack majeur fait grossir la courbe d’adoption des solutions self-custody. C’est lent, c’est discret, mais c’est inéluctable.
Et maintenant ? Les scénarios possibles
Les fonds volés vont-ils être blanchis ? Une partie a déjà été convertie via des bridges cross-chain. Les équipes de traçage (Chainalysis, MistTrack, équipes Solana) sont à l’œuvre. Historiquement, une portion non négligeable des fonds hackés finit gelée ou récupérée.
Côté Upbit, la plateforme va très probablement renforcer encore ses procédures : réduction des montants en hot wallet, assurance plus élevée, peut-être même une transparence accrue type « proof of reserves » en temps réel.
Pour Solana, cet épisode pourrait paradoxalement renforcer le narratif : même quand 36 millions sont volés sur un exchange majeur, le réseau continue de tourner à 65 000 transactions par seconde et le prix monte. C’est la démonstration ultime de robustesse.
Le marché crypto a changé. Les incidents qui faisaient trembler la terre en 2018 ou 2022 sont désormais absorbés en quelques heures. Les investisseurs ne fuient plus, ils analysent. Ils savent faire la différence entre un problème d’exchange et un problème de protocole.
Upbit saigne, Solana tient bon, et la décentralisation progresse d’un cran. C’est peut-être ça, la vraie nouvelle de la journée.
(Article mis à jour le 27 novembre 2025 à 21h00 – suivi en temps réel de l’évolution du dossier)
