Le monde de la cryptomonnaie retient son souffle. Ce 8 mai 2025, le Sénat américain a rejeté le vote procédural du GENIUS Act, un projet de loi visant à encadrer les stablecoins, ces monnaies numériques indexées sur des actifs stables comme le dollar. Avec un score de 48 voix pour et 49 contre, loin des 60 nécessaires pour avancer, ce revers marque un coup dur pour l’industrie crypto en quête de clarté réglementaire. Pourquoi ce projet, soutenu par une coalition bipartite, a-t-il échoué ? Et surtout, quelles sont les implications pour l’avenir des stablecoins aux États-Unis ?

Un revers inattendu pour le GENIUS Act

Le GENIUS Act, acronyme de Guiding and Establishing National Innovation for US Stablecoins, promettait d’être une étape historique. Porté par le sénateur républicain Bill Hagerty, ce texte ambitionnait de créer un cadre réglementaire clair pour les stablecoins, garantissant à la fois l’innovation et la protection des consommateurs. Pourtant, malgré des mois de négociations et un vote favorable au sein de la commission bancaire du Sénat, l’opposition démocrate a fait basculer la balance.

Le Sénat a manqué une opportunité unique d’affirmer le leadership américain dans les stablecoins.

Scott Bessent, Secrétaire au Trésor

Le vote de clôture, nécessaire pour entamer les débats formels, a révélé des fractures inattendues. Deux sénateurs républicains, Josh Hawley et Rand Paul, se sont joints aux Démocrates pour voter contre. De plus, le chef de la majorité, John Thune, a changé son vote à la dernière minute, une manœuvre procédurale visant à permettre une future révision. Mais pour l’heure, le projet est au point mort.

Pourquoi les Démocrates ont-ils bloqué le GENIUS Act ?

Les raisons de l’opposition démocrate sont multiples, mêlant préoccupations techniques et considérations politiques. Plusieurs sénateurs, dont Chuck Schumer et Elizabeth Warren, ont exprimé des inquiétudes sur les lacunes du texte en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et les risques liés aux émetteurs étrangers de stablecoins. Ces critiques ne sont pas nouvelles : dès le 3 mai, neuf sénateurs démocrates avaient publié une déclaration conjointe, exigeant des amendements sur cinq points clés.

Les cinq préoccupations démocrates majeures :

  • Lutte contre le blanchiment d’argent : Renforcer les obligations pour détecter les transactions illicites.
  • Émetteurs étrangers : Limiter l’influence des stablecoins émis hors des États-Unis.
  • Sécurité nationale : Protéger contre les risques géopolitiques liés aux cryptomonnaies.
  • Stabilité financière : Garantir que les stablecoins n’ébranlent pas le système bancaire.
  • Sanctions renforcées : Imposer des amendes dissuasives, jusqu’à 1 million de dollars par jour.

Un autre facteur, plus politique, a pesé lourd : les liens de Donald Trump avec l’industrie crypto. Depuis son retour à la présidence, Trump a multiplié les initiatives dans ce secteur, notamment via des memecoins et des dîners de collecte de fonds. Pour des Démocrates comme Warren, soutenir le GENIUS Act risquait de légitimer ces activités, perçues comme des conflits d’intérêts.

Un échec qui divise les rangs

Le vote a également mis en lumière des tensions au sein des deux partis. Côté républicain, les défections de Hawley et Paul reflètent une méfiance envers une régulation perçue comme trop intrusive. Hawley, en particulier, a critiqué le texte pour son manque de protections contre les abus des grandes entreprises technologiques. De leur côté, certains Démocrates, comme Ruben Gallego, qui avait bénéficié de 10 millions de dollars de dons de PAC pro-crypto en 2024, ont appelé à une pause pour réviser le texte, sans pour autant le rejeter définitivement.

Ce vote équivaut à tuer l’industrie crypto aux États-Unis.

Bill Hagerty, Sénateur républicain

Pour les défenseurs du projet, comme la sénatrice Cynthia Lummis, cet échec est un signal alarmant. Selon elle, retarder la régulation des stablecoins pourrait freiner l’innovation et céder du terrain à des juridictions comme l’Union européenne ou Singapour, qui avancent rapidement sur leurs propres cadres réglementaires.

Les stablecoins : un enjeu stratégique

Pourquoi les stablecoins sont-ils au cœur de ce débat ? Contrairement aux cryptomonnaies volatiles comme le Bitcoin, les stablecoins sont conçus pour maintenir une valeur stable, souvent indexée sur le dollar. Ils jouent un rôle clé dans les échanges crypto, les paiements transfrontaliers et même les applications de finance décentralisée (DeFi). En 2025, leur volume de transactions dépasse les 7 trillions de dollars annuels, selon les estimations de CoinMarketCap.

Pour les États-Unis, réguler les stablecoins est une question de leadership économique. Un cadre clair pourrait renforcer la domination du dollar dans l’économie numérique, tout en attirant des entreprises innovantes sur le sol américain. À l’inverse, un vide réglementaire risque de pousser ces acteurs vers des pays plus accueillants.

Pourquoi les stablecoins sont stratégiques :

  • Paiements rapides : Les stablecoins permettent des transactions quasi instantanées à faible coût.
  • Adoption mondiale : Ils sont utilisés dans plus de 100 pays, selon les données de Stripe.
  • Innovation DeFi : Ils alimentent les protocoles de finance décentralisée, en pleine expansion.
  • Concurrence géopolitique : Une régulation efficace renforce la position des États-Unis face à la Chine ou l’Europe.

Quel avenir pour le GENIUS Act ?

Si le GENIUS Act est en pause, il n’est pas encore enterré. Des sénateurs comme Mark Warner estiment que des ajustements sont possibles pour répondre aux préoccupations démocrates. Les négociations pourraient reprendre dès la semaine prochaine, avec un accent mis sur des amendements renforçant la lutte contre les activités illicites et la sécurité nationale.

En parallèle, l’industrie crypto ne reste pas immobile. Des projets comme Rexas Finance, une plateforme axée sur les actifs tokénisés, continuent de lever des fonds et d’attirer des investisseurs. Avec plus de 35 millions de dollars collectés et une communauté de 100 000 membres, Rexas illustre la vitalité du secteur, même en l’absence de régulation claire.

Impact sur le marché crypto

L’échec du GENIUS Act a déjà des répercussions. Les prix des principaux stablecoins, comme Tether (USDT) et USDC, ont enregistré une légère baisse dans les heures suivant le vote, reflétant l’incertitude des investisseurs. Parallèlement, le Bitcoin, qui oscille autour de 101 000 dollars, reste relativement stable, signe que le marché digère cette nouvelle sans panique immédiate.

Cependant, à plus long terme, l’absence de régulation pourrait freiner l’adoption institutionnelle des stablecoins. Les grandes entreprises, comme Stripe, qui a récemment déployé des comptes en stablecoins dans plus de 100 pays, pourraient hésiter à investir massivement sans un cadre légal robuste.

Un débat loin d’être clos

Le rejet du GENIUS Act met en lumière les défis d’une régulation crypto dans un contexte politique polarisé. Entre les craintes d’abus financiers et les ambitions de leadership technologique, les États-Unis se trouvent à un carrefour. Les prochaines semaines seront cruciales pour déterminer si le Congrès peut surmonter ses divisions et proposer un cadre qui équilibre innovation et sécurité.

Sans régulation claire, les États-Unis risquent de perdre leur avance dans la course mondiale à la blockchain.

Cynthia Lummis, Sénatrice républicaine

Pour les investisseurs et les passionnés de cryptomonnaies, cet épisode est un rappel : le chemin vers une adoption généralisée est semé d’embûches. Mais il souligne aussi l’importance de rester informé et engagé dans un secteur en constante évolution. Que réserve l’avenir au GENIUS Act ? Seul le temps, et les négociations à venir, nous le diront.

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