Imaginez un instant un monde où le dollar américain ne serait plus le roi incontesté des échanges internationaux. C’est le cauchemar qui hante les nuits de Washington, et Donald Trump vient de le rappeler sans ambages. Alors que les pays de l’alliance BRICS+ évoquent de plus en plus ouvertement leur volonté de s’affranchir de la domination du billet vert, le futur locataire de la Maison Blanche sort l’artillerie lourde : des droits de douane massifs à l’encontre de ceux qui oseraient défier l’hégémonie du dollar.
Le dollar, pilier de la puissance américaine
Depuis les accords de Bretton Woods en 1944, le dollar règne en maître sur le système financier international. Son statut de monnaie de réserve mondiale assure aux États-Unis un “privilège exorbitant”, pour reprendre la célèbre formule de Valéry Giscard d’Estaing. Grâce à ce privilège, Washington peut financer à moindre coût ses déficits abyssaux en empruntant dans sa propre monnaie.
Mais au-delà des avantages économiques, le dollar est surtout un formidable levier d’influence géopolitique. En contrôlant la monnaie dans laquelle s’effectue l’essentiel du commerce international, en particulier celui des matières premières stratégiques comme le pétrole, les États-Unis disposent d’un pouvoir sans égal pour sanctionner les pays récalcitrants.
Les BRICS en quête d’émancipation monétaire
Face à cette toute-puissance du dollar, les pays émergents du groupe BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) cherchent depuis plusieurs années à réduire leur dépendance envers la devise américaine. Leur objectif : mettre en place un système monétaire multipolaire plus équilibré, reflétant le poids croissant des économies émergentes dans l’économie mondiale.
Ces derniers mois, les déclarations se sont multipliées en ce sens. De la Chine à la Russie en passant par l’Iran ou le Venezuela, nombreux sont les pays qui appellent à “dédollariser” les échanges internationaux. Certains, comme Pékin et Moscou, ont même commencé à régler une partie de leur commerce bilatéral dans leurs monnaies nationales.
Le projet de monnaie commune des BRICS
- Objectif : réduire la dépendance au dollar dans le commerce intra-BRICS
- Panier de devises : yuan, rouble, roupie, real, rand
- Étape vers une “dédollarisation” plus large de l’économie mondiale ?
Trump sort l’arme des sanctions commerciales
C’est dans ce contexte de remise en cause croissante de l’ordre monétaire dominé par le dollar que Donald Trump a choisi de contre-attaquer. Dans un message au ton particulièrement martial, le président élu a prévenu :
En clair, Washington est prêt à user de son pouvoir de sanctions économiques pour dissuader toute tentative de contournement du dollar. Les pays qui franchiraient le Rubicon s’exposeraient à des droits de douane prohibitifs et perdraient leur accès au marché américain, menace Donald Trump.
Reste à savoir si ces menaces suffiront à faire rentrer dans le rang les BRICS et leurs alliés. La Chine, en particulier, semble déterminée à long terme à bâtir une alternative crédible au dollar, autour de sa propre monnaie, le yuan. Quant aux autres pays émergents, beaucoup considèrent le joug du dollar comme un frein à leur développement et à leur souveraineté.
Vers une nouvelle guerre des monnaies ?
Les déclarations tonitruantes de Donald Trump semblent en tout cas sonner le glas de la “patience stratégique” dont se prévalait jusqu’ici Washington face aux velléités d’émancipation monétaire des pays émergents. C’est une véritable guerre des monnaies qui pourrait se profiler, sur fond de tensions géopolitiques et commerciales croissantes entre les États-Unis et le reste du monde.
À court terme, il est probable que la puissance financière américaine et la menace de sanctions fassent plier la plupart des challengers potentiels du dollar. Mais à plus long terme, la multiplication des initiatives visant à réduire la dépendance à la devise américaine, de la part d’un nombre croissant de pays, pourrait bien finir par ébranler son hégémonie.
Une chose est sûre : le combat pour la suprématie monétaire mondiale ne fait que commencer, et Donald Trump vient de donner le coup d’envoi d’une bataille qui s’annonce longue et acharnée. Dans un monde de plus en plus multipolaire, le “privilège exorbitant” du dollar n’est plus tout à fait ce qu’il était.