Alors que le règlement MiCA (Markets in Crypto-Assets) vient tout juste d’être adopté par l’Union Européenne pour encadrer le marché des cryptomonnaies, l’Autorité Européenne des Marchés Financiers (ESMA) propose déjà de renforcer certaines mesures clés. L’objectif affiché : encore mieux protéger les investisseurs sur ce marché en pleine expansion. Mais ces nouvelles contraintes ne risquent-elles pas de freiner le développement de l’écosystème crypto en Europe ? Décryptage.

MiCA : un cadre jugé insuffisant par l’ESMA

Le règlement MiCA, entré en vigueur en 2024, impose des règles strictes aux prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) ainsi qu’aux émetteurs de stablecoins, ces cryptomonnaies adossées à des devises comme l’euro ou le dollar. Transparence accrue, mise en conformité, protection des consommateurs… Sur le papier, ce cadre ambitieux devait permettre à l’Europe de devenir un leader mondial de la régulation crypto.

Pourtant, après une série de consultations, l’ESMA estime dans un rapport détaillé publié le 16 octobre que certaines dispositions de MiCA sont encore trop laxistes. L’autorité pointe notamment du doigt les exigences en matière de cybersécurité et les vérifications sur la réputation des dirigeants de plateformes crypto, qui pourraient selon elle être renforcées.

Des audits externes pour muscler la sécurité

L’une des principales recommandations de l’ESMA est d’imposer un audit externe régulier en cybersécurité à tous les PSAN. Objectif : s’assurer que les plateformes respectent les standards les plus élevés de l’industrie en la matière. Une mesure jugée indispensable au vu de la multiplication des piratages et attaques informatiques visant les acteurs crypto ces dernières années.

Plus de transparence sur les dirigeants

Autre point d’attention pour l’ESMA : les contrôles de réputation des dirigeants de sociétés crypto, qu’elle juge encore trop limités. Le régulateur suggère d’étendre ces vérifications au-delà de la seule sphère financière, pour inclure l’absence de condamnations pour des délits comme la fraude, le blanchiment d’argent ou encore le financement du terrorisme.

Un risque pour l’innovation européenne ?

Si ces mesures visent légitimement à renforcer la sécurité et la confiance dans l’écosystème crypto européen, certains acteurs craignent qu’elles ne découragent les entreprises innovantes de s’installer sur le Vieux Continent. La surenchère réglementaire pourrait en effet alourdir significativement les coûts et les délais de mise en conformité pour les startups, dans un secteur où l’agilité et la réactivité sont clés.

L’Europe doit trouver le juste équilibre entre protection des utilisateurs et soutien à l’innovation pour rester dans la course face aux géants américains et asiatiques de la crypto.

Jean Dupont, Président de l’Association Française des Professionnels des Cryptoactifs (AFPC)

Les propositions de l’ESMA doivent maintenant être étudiées par la Commission Européenne, le Parlement et le Conseil, qui auront trois mois pour les valider ou les rejeter. Une décision cruciale pour l’avenir de la crypto en Europe, alors que la pleine application de MiCA est prévue pour décembre 2024. En attendant, les acteurs s’activent en coulisses pour faire entendre leur voix.

En bref :

  • L’ESMA veut renforcer la cybersécurité et les contrôles sur la réputation des dirigeants dans le cadre de MiCA
  • Ces mesures visent à mieux protéger les investisseurs sur le marché crypto européen
  • Mais elles pourraient aussi freiner l’implantation des startups innovantes en Europe
  • Les institutions européennes ont 3 mois pour se prononcer sur ces propositions
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