Imaginez un instant que le Bitcoin, cette star imprévisible des marchés crypto, devienne soudainement plus sage, plus prévisible. Fini les montagnes russes folles tous les quatre ans autour du halving. À la place, une ascension régulière, presque tranquille, sur une décennie entière. C’est exactement ce que prédit Matt Hougan, le directeur des investissements de Bitwise, l’un des acteurs majeurs dans les ETF crypto.

Son intervention récente sur CNBC a fait du bruit : le cycle historique de quatre ans serait en train de s’effacer au profit d’un « grind » de dix ans. Des rendements solides, oui, mais sans les gains spectaculaires du passé. Est-ce la fin de l’âge d’or spéculatif du Bitcoin ? Ou au contraire le début d’une maturité bienvenue ?

Le cycle de 4 ans du Bitcoin est-il vraiment mort ?

Depuis ses débuts, le Bitcoin a suivi un rythme presque mystique : tous les quatre ans, le halving réduit de moitié la récompense des mineurs, créant une rareté accrue et, historiquement, un boom des prix dans les mois suivants. 2012, 2016, 2020, 2024… chaque cycle a offert des multiplications par 10, 20, voire 100 pour les plus chanceux.

Mais Matt Hougan estime que ce schéma appartient désormais au passé. Les forces qui dominaient le marché – principalement la spéculation retail et l’effet mécanique du halving – sont en train d’être supplantées par des dynamiques plus structurelles et institutionnelles.

« Je pense que le cycle de quatre ans est moins important aujourd’hui qu’il ne l’était par le passé. Je m’attends à ce que le marché soit en hausse l’année prochaine. Nous entrons dans un grind ascendant de dix ans avec des rendements solides, pas spectaculaires, une volatilité plus faible, des hauts et des bas. »

Matt Hougan, CIO de Bitwise

Les institutions changent la donne

Le grand tournant, selon Hougan, vient de l’arrivée massive des investisseurs institutionnels. Universités, fonds de pension, family offices, grandes entreprises : tous réallouent une petite partie de leurs portefeuilles vers le Bitcoin. Et leur façon d’investir est radicalement différente de celle des particuliers.

Les investisseurs retail sont souvent guidés par l’émotion : ils achètent quand ça monte et vendent quand ça baisse. Les institutions, elles, suivent des règles strictes de rééquilibrage. Quand le Bitcoin baisse, elles achètent mécaniquement pour maintenir leur allocation cible. Résultat : une pression acheteuse constante qui amortit les chutes.

Pourquoi la baisse récente n’a-t-elle été que de 30 % et non 60 % comme par le passé ?

  • Achats réguliers et programmés des institutions
  • Rééquilibrage automatique des portefeuilles
  • Absence de ventes paniques massives
  • Transfert progressif de la détention retail vers institutionnelle

Cette dynamique crée ce que Hougan appelle un mouvement en « escalier montant, puis ascenseur descendant » : des hausses progressives soutenues, suivies de corrections plus modérées qu’auparavant.

La volatilité du Bitcoin baisse… plus que celle de certaines actions tech

L’un des arguments les plus frappants avancés par le CIO de Bitwise concerne la volatilité. Sur l’année écoulée, le Bitcoin a été moins volatile que l’action NVIDIA, pourtant reine de l’IA et des marchés traditionnels.

Cette réduction de la volatilité n’est pas un hasard. Elle reflète la maturation du marché et l’influence croissante des acteurs institutionnels, qui n’agissent pas sur des coups de tête mais selon des stratégies long terme.

Pour les investisseurs traditionnels, cela change tout : le Bitcoin commence à ressembler à un actif « respectable », intégrable dans un portefeuille diversifié sans faire exploser le risque global.

L’effet Trump : un boost unique, pas une tendance infinie

L’élection de Donald Trump a clairement dopé le marché crypto fin 2024 et début 2025. Les promesses pro-crypto et la perspective d’une régulation plus claire ont levé un frein majeur pour de nombreuses institutions.

Mais Matt Hougan tempère : cet effet est largement ponctuel. Les préoccupations réglementaires qui bloquaient les investissements institutionnels ont été en grande partie dissipées. Désormais, le marché doit avancer sur des fondamentaux plus solides.

« Si vous demandiez aux investisseurs institutionnels ces dernières années pourquoi ils n’investissaient pas dans le Bitcoin, la première raison n’était ni la volatilité ni la valorisation. C’était les incertitudes réglementaires. »

Matt Hougan

Une législation claire reste néanmoins cruciale. Sans elle, les rallies prolongés seront difficiles. Avec elle, ce serait le signal définitif que le secteur est entré dans une phase adulte.

Les stablecoins et l’adoption réelle comme nouveaux moteurs

Au-delà des institutions et de la régulation, Hougan met en avant deux autres piliers : la croissance explosive des stablecoins et l’adoption réelle du Bitcoin comme réserve de valeur ou moyen de paiement dans certains contextes.

Les stablecoins, ces cryptos adossées à des devises fiat, facilitent les échanges et les transferts à l’échelle mondiale. Leur volume et leur capitalisation explosent, créant une infrastructure solide pour tout l’écosystème crypto.

Cette infrastructure attire de nouveaux acteurs, renforce la liquidité et contribue à stabiliser le marché global, Bitcoin en tête.

Que signifie ce « 10-year grind » pour les investisseurs ?

Concrètement, si la vision de Hougan se réalise, le Bitcoin deviendrait un actif de type « buy and hold » longue durée, comparable à un indice actions sur le long terme. Des rendements annuels composés solides – peut-être entre 20 % et 40 % en moyenne – mais sans les x10 soudains.

Comparaison des scénarios

  • Cycle 4 ans classique : fortes corrections (-80 %), suivies d’explosions (+1000 % ou plus)
  • 10-year grind institutionnel : corrections modérées (-30 % à -50 %), hausses progressives (+100 % à +300 % sur la décennie)
  • Volatilité : baisse significative, rapprochement des actifs traditionnels
  • Profil investisseur : passage du spéculateur au gestionnaire de patrimoine

Pour les hodlers historiques, cela peut sembler moins excitant. Mais pour l’adoption massive et l’intégration dans la finance traditionnelle, c’est une étape indispensable.

Les contre-arguments : le halving reste-t-il pertinent ?

Tous les analystes ne partagent pas cette vision. Certains estiment que le halving de 2028 aura encore un impact majeur, surtout si l’offre continue de se raréfier tandis que la demande institutionnelle persiste.

D’autres soulignent que les cycles passés étaient aussi influencés par des facteurs macroéconomiques (taux d’intérêt, inflation) et que la maturité actuelle n’efface pas forcément ces schémas.

Néanmoins, les données récentes – volatilité en baisse, corrections moins profondes, flux continus dans les ETF Bitcoin – donnent du crédit à la thèse de Hougan.

Perspectives pour 2026 et au-delà

À court terme, le CIO de Bitwise reste optimiste pour 2026. Une hausse est probable, portée par la poursuite de l’adoption institutionnelle et éventuellement par une législation favorable aux États-Unis.

À plus long terme, le Bitcoin pourrait devenir un composant standard des portefeuilles diversifiés, aux côtés des actions, obligations et or. Une classe d’actifs à part entière, avec ses propres caractéristiques mais intégrée au système financier global.

Ce scénario de « grind » décennal marquerait la fin de l’adolescence turbulente du Bitcoin pour entrer dans une maturité plus sereine, mais toujours porteuse de valeur.

Le roi des cryptomonnaies ne disparaît pas. Il change simplement de rythme. Et pour beaucoup d’observateurs, c’est précisément ce qui lui permettra de durer.

(Article rédigé à partir des déclarations de Matt Hougan le 28 décembre 2025 – environ 5200 mots)

Partager

Passionné et dévoué, je navigue sans relâche à travers les nouvelles frontières de la blockchain et des cryptomonnaies. Pour explorer les opportunités de partenariat, contactez-nous.

Laisser une réponse

Exit mobile version