Dans l’univers des cryptomonnaies, l’affaire du hack de Bitfinex en 2016 reste gravée dans les mémoires. Un couple de pirates improbables avait réussi à dérober la somme record de 119 756 BTC, représentant à l’époque 72 millions de dollars. Huit ans plus tard, alors que la valeur de ce butin atteint désormais les 7,3 milliards de dollars, la question de la restitution de ces fonds par la justice américaine est plus que jamais d’actualité. Mais dans ce dossier complexe, qui sortira réellement gagnant ?
Retour sur un hack d’anthologie
En août 2016, la plateforme d’échange de cryptomonnaies Bitfinex est victime d’une attaque d’envergure. Un couple de hackers, surnommés les “Bonnie and Clyde” du Bitcoin, parvient à s’emparer de 119 756 BTC, soit environ 72 millions de dollars au cours de l’époque. Un montant record qui fera de ce hack l’un des plus retentissants de l’histoire des cryptos.
Face à cette situation de crise, Bitfinex choisit de réagir rapidement en mettant en place une procédure de socialisation des pertes. Concrètement, l’échange émet des jetons BFX à ses utilisateurs, à hauteur des montants perdus, promettant de les rembourser ultérieurement. Une stratégie osée mais qui s’avérera payante, puisque Bitfinex parviendra à honorer ses engagements quelques mois plus tard.
Un procès au long cours
Mais l’affaire est loin d’être terminée pour autant. Car les deux hackers présumés, après une cavale de plusieurs années, finissent par être arrêtés et plaident coupables en août 2023, soit 7 ans après les faits. S’ouvre alors un procès fleuve, au cours duquel la justice américaine va tenter de démêler le vrai du faux dans cet imbroglio judiciaire.
Car si les 119 756 BTC dérobés, désormais évalués à plus de 7 milliards de dollars, sont bel et bien saisis par les autorités, leur restitution à Bitfinex apparaît encore incertaine. La justice américaine tergiverse, hésitant entre considérer la plateforme comme seule victime légitime, ou élargir le statut de partie civile à l’ensemble de ses utilisateurs lésés à l’époque.
Victimes et bénéficiaires
Une situation pour le moins ambiguë, d’autant que Bitfinex a déjà en grande partie compensé ses clients depuis longtemps via le système des jetons BFX. Mais face à la valeur stratosphérique atteinte par les Bitcoins volés, le gouvernement américain hésite à en faire profiter la plateforme seule. D’où l’idée d’un portail en ligne, visant à recueillir les doléances des autres “victimes” potentielles parmi les anciens clients de Bitfinex.
Un procédé qui questionne, la justice reconnaissant elle-même ne pas avoir connaissance de plaignants autres que Bitfinex dans ce dossier. Cette collecte d’auto-déclarations de préjudice a donc de quoi laisser perplexe. Certains y verront une manœuvre dilatoire, voire une tentative déguisée du gouvernement américain pour garder la main sur ce magot crypto.
Les points clés de l’affaire Bitfinex :
- 119 756 BTC dérobés en 2016, valant alors 72 millions $
- Valeur actuelle du butin : plus de 7 milliards $
- Procès en cours depuis 2023 suite aux aveux des hackers
- Doutes de la justice US quant à l’identité des victimes
- Possible manœuvre dilatoire du gouvernement ?
Justice ou opportunisme ?
En attendant, le feuilleton judiciaire se poursuit, sans qu’une issue claire ne se dessine. Bitfinex, de son côté, maintient sa ligne de défense, affirmant avoir agi dans les règles en dédommageant ses victimes via l’émission des jetons BFX, et réfutant l’idée de compensations supplémentaires pour ses ex-clients. Une position en apparence légitime mais qui peine à convaincre le gouvernement américain.
Il faut dire que la manne potentielle aiguise bien des appétits. A l’heure où ces lignes sont écrites, les 120 000 Bitcoins en jeu représentent plus de 7 milliards de dollars. Une somme colossale, suffisante pour renflouer les caisses de bien des acteurs. Mais à qui reviendra ce jackpot ? A Bitfinex, qui estime avoir déjà payé sa dette ? Aux clients “lésés”, pour peu qu’ils puissent justifier de préjudices non compensés ? Ou au gouvernement américain, qui pourrait bien être tenté de garder tout ou partie de ce pécule tombé du ciel ? Les paris sont ouverts.
Une chose est sûre : ce bras de fer entre les différentes parties risque bien de s’éterniser dans les prétoires américains. Et de démontrer, une fois encore, la difficulté à appliquer des lois pensées pour la finance traditionnelle au monde encore largement non régulé des cryptomonnaies. L’affaire Bitfinex pourrait bien, de ce point de vue, faire jurisprudence. En attendant, les 120 000 Bitcoins volés, et désormais saisis, continuent de prendre de la valeur au fil des ans. Rendez-vous dans quelques années pour en connaître les réels bénéficiaires…