Imaginez passer quatre années sous la menace constante d’une enquête fédérale, avec des millions de dollars en frais juridiques et une épée de Damoclès au-dessus de votre projet innovant. C’est exactement ce que vient de vivre l’équipe d’Aave, l’un des piliers de la finance décentralisée. Et puis, soudain, la nouvelle tombe : plus d’action envisagée. Soulagement immense ou simple répit ?
Le 16 décembre 2025, Stani Kulechov, fondateur d’Aave, a annoncé publiquement la fin de l’investigation menée par la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis. Sans recommandation d’action en justice. Une victoire discrète mais capitale pour tout l’écosystème DeFi.
Une enquête longue de quatre ans prend fin sans sanction
L’histoire commence fin 2021 ou début 2022. La SEC, alors sous la direction de Gary Gensler, multiplie les enquêtes sur les projets crypto considérés comme potentiellement non conformes aux lois sur les valeurs mobilières. Aave, avec son protocole de prêt et d’emprunt décentralisé et son token de gouvernance AAVE, se retrouve dans le viseur.
Les questions portent essentiellement sur la nature du token AAVE : est-il une security au sens américain du terme ? Le protocole nécessite-t-il une registration auprès de l’autorité ? Des années de correspondances, de demandes de documents et de stress pour l’équipe.
Après quatre ans, nous sommes enfin prêts à partager que la SEC a conclu son enquête sur le protocole Aave. Ce processus a demandé des efforts et des ressources considérables de notre équipe, et de moi personnellement en tant que fondateur, pour protéger Aave, son écosystème et la DeFi en général…
Stani Kulechov, fondateur d’Aave
Cette citation, publiée sur X par Stani Kulechov lui-même, résume le poids psychologique et financier de cette période. Des ressources qui auraient pu être investies dans le développement du protocole ont été détournées vers la défense juridique.
Que signifie concrètement cette clôture d’enquête ?
La SEC a purement et simplement décidé de ne pas recommander d’action en justice. Cela ne constitue pas une approbation formelle du modèle d’Aave, mais élimine le risque immédiat d’une plainte fédérale.
Pour les utilisateurs et les développeurs du protocole, c’est une bouffée d’oxygène. Plus besoin de surveiller constamment l’actualité réglementaire américaine avec angoisse. Le protocole peut continuer à opérer sans cette menace suspendue.
Les conséquences directes pour Aave :
- Réduction drastique de l’incertitude réglementaire aux États-Unis
- Possibilité de concentrer les ressources sur l’innovation plutôt que la défense
- Signal positif envoyé aux investisseurs institutionnels hésitants
- Renforcement de la position d’Aave comme leader du lending décentralisé
Un changement de cap visible à la SEC en 2025
L’affaire Aave ne sort pas de nulle part. Elle s’inscrit dans une tendance plus large observée tout au long de l’année 2025 : la SEC abandonne ou allège de nombreuses procédures contre des acteurs crypto majeurs.
Coinbase, Kraken, Uniswap Labs… La liste s’allonge. Selon une enquête du New York Times, plus de 60 % des dossiers crypto en cours ont été suspendus, réduits ou clos depuis l’investiture de Donald Trump en janvier 2025.
Ce revirement s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, un changement de leadership à la SEC. Ensuite, une pression politique forte pour adopter une approche plus claire et moins litigieuse envers les cryptomonnaies.
Le mantra “regulation by enforcement” (régulation par les poursuites) semble appartenir au passé. Les acteurs du secteur réclament depuis des années des guidelines précises plutôt que des actions punitives surprise.
Aave dans le contexte du marché DeFi
Aave reste l’un des protocoles les plus robustes de la finance décentralisée. Lancé en 2020 sous le nom ETHLend avant de pivoter, il permet aux utilisateurs de prêter et d’emprunter des cryptomonnaies sans intermédiaire.
Son innovation majeure ? Les flash loans, ces prêts instantanés sans collatéral qui ont révolutionné certaines stratégies d’arbitrage. Le protocole gère aujourd’hui des milliards de dollars en valeur verrouillée (TVL).
Malgré cette solidité technique, le cours du token AAVE a souffert de l’incertitude réglementaire. Parti d’un sommet à 377 dollars en août, il a chuté jusqu’à 150 dollars avant de rebondir autour des 185 dollars au moment de l’annonce.
Évolution récente du prix AAVE :
- Sommet annuel : 377 $ (24 août 2025)
- Point bas post-sommet : ~150 $
- Cours au 16 décembre : ~185 $
- Performance annuelle : -51 % environ
Cette clôture d’enquête pourrait-elle déclencher un rebond significatif ? Beaucoup d’observateurs le pensent. L’élimination du risque réglementaire américain est souvent un catalyseur puissant.
Quelles leçons pour l’ensemble de la DeFi ?
Le cas Aave illustre parfaitement les défis auxquels fait face la finance décentralisée. D’un côté, une innovation rapide et mondiale. De l’autre, des régulateurs nationaux qui peinent à suivre le rythme.
Pendant des années, les projets DeFi ont dû naviguer dans un flou juridique total. Certains ont choisi de s’exiler vers des juridictions plus accueillantes comme Singapour ou les Émirats. D’autres, comme Aave, ont tenu bon.
Aujourd’hui, cette persévérance semble payer. La clôture sans sanction valide indirectement le modèle décentralisé : si le protocole avait clairement enfreint les lois, la SEC n’aurait pas hésité à agir.
Vers une régulation plus constructive des cryptos ?
Les signaux sont encourageants. Outre les clôtures d’enquêtes, on observe une volonté de définir des cadres clairs. Le FIT21 Act, débattu au Congrès, vise précisément à répartir les compétences entre SEC et CFTC.
Les tokens purement décentralisés pourraient échapper à la qualification de security. Les protocoles réellement non custodiaux seraient mieux protégés. C’est exactement le type de clarté réclamé par les développeurs.
Dans ce nouveau contexte, des projets comme Aave, Uniswap ou Compound pourraient connaître une seconde jeunesse. Les institutions, jusqu’ici frileuses, pourraient enfin entrer massivement dans la DeFi.
L’impact sur les autres projets DeFi
La nouvelle a rapidement fait le tour de la communauté. Les tokens de gouvernance d’autres protocoles lending ont connu des hausses notables dans les heures suivant l’annonce.
Compound, MakerDAO, ou encore Morpho ont bénéficié d’un effet d’entraînement. Le secteur entier respire mieux quand un de ses leaders échappe à la sanction.
- Protocoles directement impactés : Compound, Maker, Euler, Radiant
- Catégories concernées : Lending, borrowing, governance tokens
- Attente commune : Une clarification globale plutôt que des actions isolées
Beaucoup espèrent maintenant que d’autres enquêtes en cours suivront le même chemin. La liste est longue : de nombreux projets ont reçu des subpoenas ou des Wells Notices ces dernières années.
Le mot de la fin : prudence ou optimisme ?
Si cette clôture représente une victoire indéniable pour Aave et la DeFi, il convient de rester prudent. La SEC n’a pas explicitement validé le modèle. Rien n’empêche une nouvelle enquête à l’avenir si les règles évoluent.
Cependant, le vent tourne clairement. 2025 marque peut-être le début d’une relation plus apaisée entre régulateurs américains et innovation blockchain. Les projets solides, décentralisés et transparents ont toutes leurs chances.
Pour les investisseurs, c’est peut-être le moment de regarder à nouveau les tokens de gouvernance DeFi avec intérêt. Le risque réglementaire majeur semble s’éloigner, laissant place à l’innovation pure.
En définitive, l’histoire d’Aave nous rappelle que la résilience paie. Quatre années difficiles, mais un protocole toujours debout et plus fort. La finance décentralisée continue son chemin, un peu moins entravée qu’hier.
Et vous, pensez-vous que cette décision annonce une vague de closures similaires ? Ou reste-t-il encore des obstacles majeurs pour la DeFi aux États-Unis ? L’avenir nous le dira rapidement.

